Semaine d’un sériephile (13) : Tunnel, The Hour, Hello Ladies

Cette semaine, un petit mot pour féliciter les chaînes françaises qui y mettent enfin du leur. Bien sûr pas toutes et pas tout le temps : je ne vous conterai pas ma découverte de No Limit, placée sous le signe du fou rire gêné, mais je me concentrerai sur les bonnes choses. Ainsi, cette semaine, j’ai continué à suivre les aventures de la french girl Clémence Poesy dans Tunnel sur Canal +, puis j’ai zappé sur Arte pour découvrir qu’il y avait enfin une saison 2 à The Hour. J’ai complété ce visionnage par un petit rattrapage d’une création HBO de la rentrée, Hello Ladies, et c’est déjà pas mal pour quelqu’un qui souhaite rester intégré socialement.

No Limit

Mais non Vincent ! Promis je ne parle plus jamais de No Limit.

 

Tunnel

Tunnel est l’adaptation d’un concept initié par les télévisions suédoises et danoises avec Bron. Un meurtre, une frontière, deux polices qui enquêtent et deux pays pour produire le show. Bron avait déjà été adaptée aux Etats-Unis (The Bridge) avec Diane Kruger. Dans la version franco-anglaise, c’est Clémence Poesy qui incarne la flic française et Stephen Dillane (beaucoup moins flippant que dans Games of Thrones) qui représente la police de Sa Majesté. Tous deux sont chargés de collaborer pour élucider le crime d’une femme dont le cadavre a été retrouvé pile au milieu du tunnel sous la Manche. La parité entre les deux pays est assez bien respectée. Le passage d’un pays et d’une langue à l’autre est fluide. La série permet de faire une constatation majeure, les deux cotés d’une frontière sont les deux faces d’une même pièce. Ici, qu’on soit à Calais ou à Douvres, c’est la même ambiance grise et industrielle, qui sert bien l’angoisse pesante de la série, au-delà de la traque du serial killer elle-même. On sent d’ailleurs dans cette esthétique la touche Canal +, réputée pour aimer les séries aux traitements froids et réalistes (on pense à la saison 1 d’Engrenages, à Pigalle…) La série n’est donc pas très innovante, mais elle est efficace. Les personnages sont des flics classiques de séries policières : Clémence Poesy la dure, cynique et dévouée à son travail, face à l’Anglais père de famille plein d’humour. Ces archétypes ont été utilisés largement dans la fiction, et la complémentarité entre les deux n’est pas fine, mais elle marche quand même. Les auteurs ont néanmoins eu l’intelligence d’intervertir ces poncifs. C’est la douce et fragile Clémence Poesy qui joue la flic dure et Stephen Dillane qui doit combiner travail et vie de famille. L’intrigue policière elle-même suit des jalons narratifs convenus (jeu du chat et la souris, puzzle et indices distillés par le tueur, escalade dans la violence des crimes…) mais tout cela reste bien écrit et compte beaucoup sur son ambiance pour ne pas tomber dans la routine. Tunnel est une série solide, un bon travail d’artisanat.

THE TUNNEL

Dr Jekyll et Mr Hyde.

 

The Hour

La diffusion de la saison 2 de The Hour sur Arte, est l’occasion pour moi de revenir sur cette réussite, qui malheureusement n’aura pas de saison 3. L’histoire se déroule dans le Londres des années 50, où l’on assiste à la création d’un nouveau programme télévisé, The Hour, sur la BBC, qui se veut pionnière en matière de journalisme d’information, alors que la télévision n’en est qu’à ses prémices. On se concentre sur les personnages travaillant pour l’émission, dont les principaux sont Freddie Lyon, l’investigateur intrépide et tête brûlée, sa meilleure amie (avec beaucoup d’ambiguité), productrice du show, Bel Rowley, et Hector Madden, le présentateur vedette camé à la célébrité, rongé d’ambition et de dégoût pour lui même. Pourquoi The Hour est-elle une bonne série ? On passe sur la première évidence, à savoir la présence d’acteurs talentueux. D’abord Ben Winshaw (qu’on a pu voir dans Bright Star de Jane Campion ou encore dans Skyfall) qui incarne à merveille le jeune premier : idéaliste, intelligent et courageux, mais aussi suffisant, méprisant et aveugle aux sentiments des autres. Je ne vais pas m’étendre une nouvelle fois sur Dominic West, vous savez déjà tout le bien qu’on pense de lui. La jolie révélation est bien sûr Romola Garai, qu’on a pu voir dans Angel de François Ozon ou Scoop de Woody Allen, et dont la petite moue oscillant entre inquiétude, mépris et bouderie n’est pas étrangère à son charme. Pour tous les fans de comédie romantique à l’anglaise, vous serez aussi ravis de retrouver Henrietta-tronche-de-canne alias Anna Chancellor (non les amis, rien à voir avec Katherine Chancellor, elle habite Genoa City, pas Londres). Le deuxième point qui rend The Hour enthousiasmante, c’est le mélange des genres que la série arrive à distiller. La série est un mix entre Mad Men pour le coté médias vintages, analyse des personnages et couples dysfonctionnels (d’ailleurs, avez-vous vu le top à ce sujet ?), The Americans pour l’ambiance espionnage et guerre froide et The Newsroom avec laquelle elle partage un traitement très romancé du journalisme et un goût pour les intrigues amoureuses. Le résultat est original et ne sombre pas dans l’illustration d’un âge d’or passé. Les complots qui animent les plus hautes sphères de l’Etat et le climat de suspicion qui en découle permettent d’instaurer pas mal de suspense. La série n’offre pas non plus une révision totale du genre. Elle joue beaucoup avec les archétypes classiques de la série d’espionnage et y ajoute des stéréotypes issus d’autres univers : le personnage idéaliste et arrogant, la relation amour-amitié qui va s’étaler, le présentateur désagréable parce qu’auto-destructeur et malheureux… Pourtant, en réassortissant toutes ces évidences, la série parvient à trouver une voie et un ton propre, ne faisant que confirmer l’expression : « c’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleures soupes. »

The Hour

Non, The Hour n’est pas une série sur l’horlogerie.

 

Hello Ladies

Hello Ladies c’est la série de Stephen Merchant, à la fois créateur et acteur, Anglais de 2m10, connu surtout pour ses nombreuses participations avec Ricky Gervais, dont la version UK de The Office. On retrouve un peu l’humour que les deux compères ont institutionnalisé dans leur show : le rire provenant de la gêne, de l’embarras, du malaise. Mais Merchant, qui s’est vaguement inspiré de l’un de ses one man show pour la série, apporte une touche très personnelle qui éloigne sa série de The Office. Stuart Pritchard est un loser, un geek, égocentrique et obsédé par son échec avec les femmes. Il tente donc de les séduire dès qu’il en aperçoit une. Merchant exploite la maladresse chronique de son personnage, ainsi que son pathétisme pour contrebalancer les sentiments d’agacement qui naîtront forcément chez le spectateurs face à un personnage aussi pénible dans son rapport aux autres. Il tente un vrai numéro d’équilibriste en flirtant sur ces émotions contraires que ne manquera pas de susciter la série. J’ai d’ailleurs beaucoup pensé au personnage d’Harold Lloyd, clown blanc du cinéma muet, qui utilisait son physique et sa maladresse exagérée pour provoquer rire et tendresse. Merchant met néanmoins un peu de temps à trouver l’équilibre qu’il recherche et les premiers épisodes sont parfois difficile à regarder en raison de l’ambiance pesante distillée par la gêne qu’on éprouve à suivre Stuart, ses réactions particulièrement détestables face à ses amis qu’il utilise ou abandonne à la première occasion pour draguer les filles, le plus souvent de manière lourde et appuyée. Une série difficile d’accès mais qui s’améliore au fil des épisodes.

Hello Ladies

Viens sur Séries Chéries, on est bien.

2 réponses à “Semaine d’un sériephile (13) : Tunnel, The Hour, Hello Ladies

  1. Je valide The Hour avec mon chouchou Ben Wishaw (qui joue le fou furieux dans le Parfum et dans une autre série BBC chère à mon coeur The Hollow Crown). J’ai abandonné Hello Ladies par contre, j’avais envie de frapper mon ordinateur à chaque épisode, j’ai décidé d’arrêter les frais. Mais la B.O. est ouf.

    • J’ai arrêté aussi Hello Ladies. La saison 2 de The Hour est géniale mais la fin sans saison 3 est un peu abrupte !

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