Sa bio
Né à Atlanta en 1957, Alan Ball est le petit dernier d’une fratrie de quatre enfants. Sa sœur aînée se tue au volant alors qu’il n’a que treize ans, événement qui le marque profondément : le jeune Alan était dans le véhicule au moment de l’accident. Il étudie à l’Université de Georgie et à l’Université d’Etat de Floride pour devenir dramaturge puis il écrit des comédies théâtrales. Il travaille pour les séries Grace Under Fire et Cybill, allant jusqu’à devenir coproducteur de cette dernière, même s’il n’aime pas particulièrement ce projet ni l’univers dans lequel il évolue qui ignore trop le métier de scénariste. En 1999, il est le scénariste d’American Beauty, film grâce auquel il obtient la consécration un an plus tard avec un Golden Globe et un Oscar en évoquant avec un humour grinçant la crise existentielle d’un quarantenaire. Deux ans plus tard, c’est la naissance de sa série phare sur le thème de la mort, Six Feet Under, qui émouvra le public pendant cinq ans. Désormais, impossible d’ignorer le travail mis en oeuvre sur le scénario, l’écriture des dialogues, la profondeur psychologique et métaphysique de la série : le scénariste est acclamé et trouve la reconnaissance qu’il mérite. En 2007, il écrit et réalise Tabou(s), un film d’humour noir qui dépeint l’éveil à la sexualité d’une adolescente. Il récidive en 2008 avec True Blood, une série trash où les vampires, rejetés par les humains, se nourrissent de sang synthétique. En 2013, il est l’un des producteurs de Banshee. Actuellement, il travaille sur le pilote d’une nouvelle série.
Ouvertement gay, Alan Ball fait de l’homosexualité une thématique centrale de ses œuvres, de façon plus ou moins frontale.
Ses séries : de Six Feet Under à True Blood
Avec Six Feet Under, de 2001 à 2005, Alan Ball propose une réflexion riche et douloureuse, avec une lucidité sans concession, sur le thème de la mort, autour duquel s’articulent de nombreuses thématiques adjacentes : amour, désir, sexualité, couple, famille, indépendance, art, ritualité… C’est l’histoire d’une famille de croque-morts dans un Los Angeles aux couleurs désaturées, évoluant au rythme des veillées funéraires et de la thanatopraxie, de la confection de bouquets mortuaires et des enterrements. Comme dans toute tragédie, l’histoire commence par la disparition du père (la scène d’ouverture n’est pas sans rappeler le drame vécu par Alan Ball à treize ans), qui met en branle les fondements de la famille et les relations entre chacun de ses membres. La série est dotée d’un humour noir cinglant (notamment dans son pilote, avec de fausses publicités décalées pour un corbillard ou une crème de beauté pour cadavre) et d’une photographie ultra léchée : le générique est mémorable pour sa qualité graphique. On relèvera aussi un casting irréprochable d’où émerge notamment Michael C. Hall, futur héros éponyme de la série Dexter, extraordinaire dans son rôle de frère cadet coincé, homo introverti qui parvient peu à peu à s’émanciper.
Changement radical en 2008 avec True Blood. On passe de la Californie à la Louisiane, où les vampires sont légions et vivent désormais au grand jour. Les humains ayant réussi à synthétiser du sang (le fameux « True Blood »), les vampires ne sont plus censés mordre qui que ce soit, mais certains ont du mal à se faire à ce nouveau mode de vie. Les vampires subissent alors la haine et le rejet de la part d’une partie de la population (conservateurs, religieux). La série met en place une métaphore corrosive de la xénophobie. Ici encore, la mort et la sexualité, thèmes de prédilection d’Alan Ball, s’enchevêtrent radicalement. Le générique, encore un chef-d’œuvre visuel, en est la preuve, mêlant des images typiques de la Louisiane profonde à des scènes de rituels religieux, de femmes lascives et d’animaux en décomposition. La thématique du vampirisme, fouillée à l’excès, permet à Alan Ball de parler de l’Homme avec une grande acuité.
Les deux projets phares d’Alan Ball ne se ressemblent en rien, mais ils ont l’un comme l’autre une approche métaphysique du couple traditionnel éros/thanatos, avec des personnages denses, conscients de leur finitude et de leurs désirs. Six Feet Under comme True Blood sont aussi des séries engagées, humanistes, voire émancipatrices, dénonçant en chœur les archaïsmes des conservateurs, de la bonne morale judéo-chrétienne, et de la bien-pensance.
N’hésitez pas à écouter le showrunner en conversation ici :