Sa bio
Lena Dunham est une vraie New-Yorkaise pure souche, elle y est née et a grandi entre Soho, Manhattan et Brooklyn. Pour compléter le cliché, elle a été élevée dans un univers créatif puisque sa mère, Laurie Simmons est artiste et photographe et son père Caroll Dunham un peintre reconnu (pour preuve, il a une page sur le site du MoMA). Le parcours de Lena Dunham est assez simple. Elle va à l’école (la saint Ann’s school), une école assez riche et huppée avec plein d’enfants du monde du show-biz, elle y rencontre sa meilleure amie Jemima Kirke qui jouera dans son premier film Tiny Furniture, puis incarnera Jessa dans Girls. Ensuite elle va à la Fac d’Oberlin dans l’Ohio pour suivre des cours d’écriture. Elle réalise quelques courts-métrages dont Deadline qui est sélectionné dans un festival indépendant en marge de Sundance, où elle rencontre tout un tas de gens connus dans les milieux underground. Puis, elle loue un bureau en coloc avec Greta Gerwig (l’actrice qui incarne Frances Ha dans le film du même nom), égérie du mouvement Mumblecore (un sous-courant naturaliste parmi les films indé US). Elle réalise son premier film, (Tiny Furniture donc), qui gagne le prix du jury du festival américain indépendant South by Southwest (SXSW pour les intimes). Elle avait tout pour continuer dans ce courant indé-new-yorkais-underground, et peu de chances de terminer sur le câble – qu’on irait pas jusqu’à définir comme populaire mais quand même – comme HBO. Grâce à quoi ? Sa rencontre avec Judd Apatow. Ce dernier remarque son film, lui envoie un e-mail. C’est le début d’une relation de mentorat. Trois mois plus tard Girls était retenue par HBO (début 2011) avec la caution de la star de la comédie américaine. Depuis Lena Dunham est devenue une véritable icone. On parle d’elle partout, en bien ou en mal, on la considère comme la voix de la génération Y, elle pose pour des magazines, traie des vaches, mélange sexe et politique, fait des interviews rigolotes et féministe, s’attaque au porno, participe à des projets artistiques numériques, écrit des livres de commande sur tout et rien pour 3 millions de dollars. Et ce, en seulement deux petites années d’existence de sa série.
Son style
Lena Dunham est à l’origine d’un long-métrage et d’une série, mais on peut déjà dire que son style est très personnel et reconnaissable entre mille.
Son ton : Ce n’est pas pour rien que sa relation avec Judd Apatow est fusionnelle. Le ton de Lena Dunham est assez proche de ce que le producteur-réalisateur a pu explorer en terme de dramaturgie. Une apparence de comédie et d’humour, qui cache beaucoup de nostalgie, d’angoisses et de tristesse. Bien sûr, Dunham tire plus vers le drame qu’Apatow, mais il n’en reste pas moins que dans les deux cas, le rire est souvent l’occasion d’appuyer et de mettre au jour le désespoir des personnages. On pense beaucoup à Freaks and Geeks dans la manière de construire ces personnages. D’ailleurs dans les deux cas on est souvent plus proches du sourire que du rire tant certaines situations peuvent être plombantes.
Ses thématiques : D’abord et avant tout, elle-même. Ses deux créations sont très auto-fictionnelles : elle parle très souvent de ses angoisses et consacre plusieurs épisodes à ses tocs. C’est aussi pour ça, en plus de son goût pour New-York, qu’on l’a parfois comparée à Woody Allen (qui n’est pas en reste pour mélanger humour et drame). Autour de ses expériences personnelles, elle déroule plusieurs fils conducteurs : la jeunesse d’aujourd’hui, le corps féminin, l’amour et le sexe, et l’amitié. Dans l’épisode 1 de la première saison de Girls, Hannah, le personnage qu’elle interprète, tente de convaincre ses parents de continuer à la soutenir financièrement en leur démontrant ses talents d’écrivain : « I think that I may be the voice of my generation. Or at least A voice. Of A generation. » Cette phrase a beaucoup été reprise pour parler du show. Lena Dunham porte à l’écran des personnages jeunes, représentants de la nouvelle génération touchée par la crise et les stages à outrance, sa difficulté d’insertion dans le monde adulte, mais également un certain confort qui lui permet de prendre du temps pour choisir sa voie, papillonner, se poser des questions. Certains se sont rangés derrière le talent de la créatrice à dépeindre des préoccupations contemporaines, quand d’autres lui ont reproché de parler du haut de sa tour d’argent et de son milieu aisé, qui serait à l’origine du manque de diversité ethnique de sa série. Les autres thèmes sur lesquels on peut considérer qu’elle a apporté un regard neuf, sont la représentation du corps féminin et la sexualité. Concernant le corps féminin, elle part du constat que le sien ne correspond pas aux canons de beauté en vigueur et le met régulièrement en scène dans son show. Elle a déclaré vouloir forcer les gens à prendre son corps en considération, en l’imposant au regard du spectateur au fil des épisodes. La nudité est donc très présente dans sa série. Parfois de manière gratuite, mais le plus souvent de manière réaliste. Il s’agit d’avantage de séquences de nudité de la vie quotidienne et non de sexualisation du corps féminin. Là encore Lena Dunham a subi le vent des critiques, on lui reproche son égocentrisme, son impudeur, le fait de desservir son intention initiale. Concernant le sexe, elle tente dans Girls de le dédramatiser, de retirer de sa représentation la charge émotionnelle, romantique et amoureuse qu’on a tendance à lui accoler dans la fiction classique. Elle préfère montrer l’embarras, la gêne et parfois l’échec, en abordant l’acte sexuel de manière très crue.
Son esthétique : Son parcours personnel l’a amenée à côtoyer de très près le monde du film indépendant et en particulier quelques représentants du Mumblecore. Ces rencontres ont influencé l’esthétique de Girls. On peut considérer la série comme étant naturaliste : les séquences sont très longues et étirées, avec peu de plans de coupe, un montage discret, des décors naturels (surtout des petits appartements sombres de Brooklyn). La ville est également très présente et participe à l’impression de réalité du show : elle filme Brooklyn, ses quartiers sales et vivants, son énergie. Pour les couleurs et la tonalité qui donnent son ambiance à la série, elle a choisi les bruns et les ocres, fidèles à l’image qu’on se fait de New-York à l’automne dans les quartiers plus populaires que Manhattan, ce qui renforce la petite touche de désenchantement et de nostalgie de Girls.
Pour résumer, on peut dire que la jeune Lena Dunham, qui a eu 27 ans cette année, a réussi à s’imposer comme un showrunner* de premier plan en très peu de temps. Elle déchaîne les passions. Connue de tous, pour une série qui a finalement assez peu de visibilité comparée à d’autres (environ 700 000 spectateurs sur HBO par épisode), elle est portée aux nues et adulée, critiquée et détestée à l’excès. Dans tous les cas elle déclenche des débats passionnés, signe qu’avec Girls, elle a réussi à provoquer et à mettre le doigt là où ça fait mal.
Mais comme c’est elle qui en parle le mieux, voici son « Season 1 – Inside The Episode #1 » (vous pouvez retrouver toutes les vidéos sur chacun des épisodes sur Youtube).
Sa série
Sources et lectures complémentaires
« Lena Dunham, portrait d’une supergirl », Les Inrocks, Olivier Joyard, avril 2013
« Lena Dunham: the new queen of TV’s golden girls« , The Observer, Paul Harris, septembre 2012
« Lena Dunham : l’anti-bimbo de HBO », Télérama, Cécile Mury, avril 2013
« It’s Different for ‘Girls' », New York TV, Emily Nussbaum, mars 2012
« ‘Girls’: Lena Dunham Talks ‘Voice of A Generation’ Line », Huffpost TV, Leigh Weingus, octobre 2013
et pour lire sa prose : « Deliverance », The New Yorker, Lena Dunham, novembre 2013
Je l’aime bcp !
Nous aussi à la rédac, on l’adore. Mais j’ai eu un nombre de débats incalculables et passionnés avec d’autres amies. Elle ne fait pas du tout l’unanimité. Ce qui est incompréhensible. Team Lena !