Etude de pilote : Heroes Reborn

Voilà. Après cinq ans d’absence, la douce voix off de Mohinder Suresh (Sendhil Ramamurthy) est de retour pour susurrer quelques bricoles philosophiques en début et en fin d’épisode d’une série qui aura tant exalté et déçu notre jeunesse sériephile. Heroes Reborn n’est pas, comme on nous l’avait vendu, un reboot de Heroes, mais bel et bien une suite, pour le meilleur et surtout pour le pire. Explications.

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Heroes, c’était quoi ?

En 2006, j’ai été l’un des fans effrénés de Heroes, série chorale à l’esthétique très BD mettant en scène des gens ordinaires éparpillés à travers le monde, développant chacun un super-pouvoir digne de ceux des X-Men. Très vite, la série a révélé ses failles : sous couvert d’une intrigue fortement intriquée et de belles promesses scénaristiques, il s’est avéré qu’elle reposait principalement sur des cliffhangers efficaces, et que le contenu des épisodes était très vide. Bien sûr il y avait des personnages forts et les prémisses d’une mythologie intéressante : le méchant Sylar notamment nous aura fait mourir d’angoisse dans la saison 1, incarné par le désormais omniprésent Zachary Quinto. De belles idées émaillaient l’histoire : une pom-pom girl invincible qu’il fallait sauver, des voyages dans le temps, un artiste qui pouvait peindre le futur… Disons de manière générale que la série savait mixer les références aux comics et les renversements de situation inattendus, en particulier dans l’attribution des pouvoirs (par exemple, un super-méchant doté du pouvoir de guérir, un don habituellement réservé aux mecs relous tels que Brian Krause). Petit à petit, les effets de suspense de la série n’ont cessé de tomber à plat et de faire traîner des intrigues sans intérêt. Si bien que bon nombre de fans ont arrêté de regarder Heroes avant la fin de la saison 4.

Heroes Reborn, suite ou reboot ?

En démarrant le pilote de Heroes Reborn, je partais avec une attente forte. J’imaginais qu’on allait retrouver le concept de la série originale, ces gens ordinaires dotés de super-pouvoirs, remanié à la sauce des séries d’aujourd’hui, quelque chose de plus audacieux, peut-être à la manière d’Utopia (dont l’esthétique très comics se rapproche de celle de Heroes). Hélas le créateur et producteur de la série, Tim Kring, n’a pas changé, et persiste à jouer la carte de l’allèchement (en témoigne un teasing assez lourdingue) au détriment du contenu. Stratégie pas forcément judicieuse, car Heroes Reborn est bien partie pour reproduire à l’identique les défauts de la série précédente.
L’esthétique est toujours là, très BD, très colorée, avec des décors souvent stylisés. On retrouve le thème musical, toujours agaçant, et les titres des épisodes en aplats, avec la même police d’écriture. Pas de doute : on est en terrain connu. Les effets spéciaux pas terribles s’enchaînent, on aurait pu s’attendre à mieux, d’autant que les régénérations de la pom-pom girl invincible Claire Bennet, dans Heroes, étaient plutôt bluffantes. Une intrigue compliquée se met en place peu à peu : on se demande qui est qui, qui est gentil et qui est méchant. Les personnages ne sont hélas pas très charismatiques ni originaux. On a l’impression d’avoir déjà vu mille fois ces situations, et on n’est jamais vraiment désarçonnés. En revanche, le fan service est au rendez-vous, avec des clins d’œil à n’en plus finir à l’ancienne série. A tel point qu’on se demande, au final, si la série pourra plaire à quelqu’un qui n’aurait pas vu Heroes au préalable.

Les héros et les gens ordinaires

Les questions posées par le pilote, cet éternel rabâchage au sujet de l’unicité et du potentiel de chacun d’entre nous, la capacité de tous à être des « héros » et à changer les choses, tout cela semble désespérément remâché et n’apporte rien de nouveau. A priori, la série n’a pas l’intention de s’adapter aux questions et problématiques nouvelles qui sont apparues dans notre monde entre 2006 et 2015. Pour faire perdurer les films et séries de super-héros, dont le sage Spielberg a prophétisé l’extinction, il faudra pourtant un jour prendre le temps de réactualiser leur place dans la société : plutôt que des héros persécutés parce qu’ils sont différents, pourquoi pas des héros narcissiques munis de perches à selfies, dont on suivrait les exploits sur Vine ou Instagram ? Plutôt que la sempiternelle découverte des super-pouvoirs, suivie d’une laborieuse phase d’apprentissage, pourquoi pas des héros blasés qui exécuteraient leurs missions comme une routine ennuyeuse, juste pour gagner de l’argent ? Pourquoi ne pas emprunter les codes d’une série de pompiers comme New York 911, ou même d’une série hospitalière comme Urgences, dans lesquelles vies privées et « héroïsme » quotidien s’entremêlent sans cesse ?

A moins que le pilote de Heroes Reborn ne soit qu’un hameçon, jouant à fond la carte du fan service pour capter notre curiosité, et nous entraîner par la suite sur des sentiers inconnus, il semblerait que la série se dirige vers le même destin que celui de son aînée.

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