Etude de pilote : Blood Drive ; le nanar en série, est-ce que ça marche ?

La nouvelle série made in Syfy ne fait pas vraiment dans la demi mesure. Amateurs de gros cubes, de gore qui tâche et de sucettes (et oui pourquoi pas), bienvenue, cette série s’adresse avant tout à vous. Se déroulant en 1999, Blood Drive nous plonge dans une sorte de rétro futur dystopique et post-apocalyptique. Dans cette version de l’histoire les ressources naturelles se sont raréfiées beaucoup plus rapidement que pour nous. L’eau ou l’essence sont devenues des denrées rares extrêmement prisées, réservées seulement à une élite disposant de très gros moyens. L’originalité de Blood Drive est d’avoir trouvé LA parade à la pénurie. Quel liquide pourrait bien alimenter un moteur de voiture ? L’huile de friture ? Le jus de betteraves ? Que nenni, utilisons du sang bien sûr ! Une idée loufoque qui résume à peu près tout l’esprit de la série, complètement barré et totalement trash.

Série Z quand tu nous tiens

Très rapidement le pilote de la série nous apprend l’existence d’un mystérieux club de métalleux en goguette amateurs de mutilations et de grosses cylindrées. Ces joyeux drilles nous allons les suivre dans la fameuse Blood Drive, compétition où presque tous les coups sont permis pour arriver le premier en semant carnage et chaos derrière soi. A la clé une prime de 10 millions de dollars et la promesse d’une toute nouvelle vie. Chaque épisode constituera une étape de cette festive compétition. Détail cocasse : à chaque étape le pilote arrivé en dernier se fera exploser la cervelle par le grand manitou du coin, Slint, mélange improbable entre Marylin Manson, le Joker et le pingouin version Gotham. Légère pression s’il en est.

Le principe même de la série renvoie presque trait pour trait au film Death Race (Course à la mort) produit par Roger Corman dans les années 70 et ayant connu un remake plus récemment avec Jason Statham. Dans les deux cas on retrouve une galerie de pilotes hauts en couleurs ayant tout de véritables psychopathes. Là où Death Race constituait une piquante satire du problème de la surpopulation, le principe de la course étant d’écraser le plus possible de piétons, Blood Drive reprend l’une des autres problématiques du monde moderne, l’épuisement des réserves naturelles. Attention par contre, exactement comme le film de Corman, ce genre de choses n’est qu’un prétexte pour un joyeux défouloir décomplexé.

N’attendez aucun réalisme, ici l’absurdité règne et ne s’embarrasse pas d’explication. Si les voitures ont des dents c’est comme ça ma bonne dame, ne posez pas de questions et circulez y a rien à voir. On en ressort avec l’impression d’être dans un trip halluciné qui ne se prend jamais au sérieux. Autre référence très assumée de la série, jusque dans les visuels de promotion : le diptyque Grindhouse de Tarantino et Robert Rodriguez avec Boulevard de la mort et Planète Terreur. On retrouve dans la série de Syfy une certaine esthétique proche de ces films mais surtout le même esprit à la fois malsain et badass qui donne une vraie personnalité à la série.

Série B voire Z assumée, Blood Drive joue la carte de la contre programmation au milieu d’un paysage de séries souvent cérébrales et exigeantes. Ici, la seule contrainte imposée se résume à gentiment débrancher son cerveau pour se laisser embarquer.

Archétypes et clichés, le jeu dangereux du nanar assumé

Les personnages principaux de Blood Drive ne sont pas des modèles de complexité c’est le moins que l’on puisse dire. Tous renvoient à des types bien codifiés qui sont autant de références avec lesquels s’amusent les créateurs de la série. On retrouve en premier lieu le duo de personnages contraints de se supporter mais s’entendant comme chiens et chats. Grace D’Argento (Christina Ochoa), l’atout charme de la série et Arthur Bailey (Alan Ritchson), l’atout muscle incarnent ce duo forcé. Bien sûr tout rapprochement physique et sentimental serait extrêmement surprenant.

Grace D’Argento ressemble à une fusion très assumée et plutôt efficace entre le personnage de Megan Fox dans les premiers Transformers et celui joué par Rose McGowan dans Planète Terreur. L’amateur d’héroïnes séductrices et violentes sera donc en terrain connu. Le pauvre Arthur, surnommé Barbie, assume lui le rôle du justicier sans peur et sans reproche plongé dans un univers qu’il ne comprend pas. Un grand classique à nouveau. Dommage par contre le côté boy scout n’est pas vraiment poussé. On aurait pu souhaiter que son décalage soit à l’origine de quelques ressorts comiques.

Et puis, comme dans toute bonne série Z, difficile de ne pas évoquer le rôle qui fait souvent la différence entre le bon et le mauvais nanar, le grand méchant pas beau faisant régner la terreur. Colin Cunningham s’en donne ici à cœur joie dans le rôle de Julian Slink. Cabotinant et vociférant à l’envi, le personnage rejoint la grande galerie du grand guignol débridé. Looké à la manière d’un chanteur de métal steampunk, on peut d’ores et déjà lui prédire un grand avenir en cosplay si la série fonctionne. Ce personnage mystérieux donne en tout cas l’envie de le découvrir un peu plus. Simple maître loyal dégingandé au début de l’épisode, il finit par intriguer et susciter l’envie de décoder le mystère sous le maquillage. On peut espérer par contre qu’il gagne un peu de fantaisie et ne reste pas monocorde tout au long des 13 épisodes. Si son costume est plutôt funky son charisme et ses gesticulations ne suffiront pas à nous captiver à ce train-là jusqu’au bout de la saison.

Un petit air de Hellfest ?

Si quelque chose a bien été travaillé sur cette série c’est bien son esthétique trash. Outre le gore très présent on baigne dans le cambouis, la sueur et le métal. Il souffle comme un petit air de Clisson sur Blood Drive. Rares sont les moments où un petit rock bien énervé ne vient pas s’inviter à la fête de manière d’ailleurs toujours très expressive.

Attention, la musique n’est pas là juste pour faire joli, elle apporte aussi et surtout un humour bienvenu en commentant la moindre scène avec force ironie. Citons par exemple la première apparition de Slint. Alors que l’on découvre la joyeuse confrérie des méchants à sales gueules sur les paroles de Mobscene de Marylin Manson, le grand sachem fait lui son entrée de manière très théâtrale sur la Marseillaise version Mireille Mathieu. Oui vous avez bien lu, Mireille sur Syfy. Si cet exemple constitue un sommet dans le décalage on retrouve néanmoins toujours cette espèce de commentaire sur une scène par la musique et par les paroles. Clin d’œil à Tarantino et à son usage expressif de la musique ? Peut-être, il en ressort en tout cas que Blood Drive est la série idéale à regarder avant de prendre le chemin du Hellfest. Avis aux amateurs, les séries métal ne courent pas vraiment les rues.

Le gros souci par contre qui se pose dès ce pilote, c’est qu’on s’endort légèrement entre deux courses poursuites ou moments d’action. Paradoxal pour une série sur la course automobile ! La faute en revient peut-être au fait qu’on ne rit pas devant Blood Drive. Même si la série ne se prend jamais au sérieux, l’absurdité tourne très rarement à la comédie. On se retrouve donc à voir des personnages grimacer et se comporter comme des pantins de bandes dessinées mais on n’enclenche que très rarement la seconde, là où ce délire pourrait devenir vraiment jouissif. Il est permis d’espérer malgré tout. La fin de l’épisode nous montre des héros à la recherche d’adrénaline, copulant sur l’épique Kings of the World de Def Leppard, le tout agrémenté de répliques pas piqué des hannetons, ce qui laisse à penser que nous n’avons pas encore tout vu. Croisons les doigts.

Blood Drive respecte sa promesse. Cette série est un divertissement complètement régressif et foutraque mais qui s’assume comme tel. S’adressant à un public de niche, Blood ne plaira pas à tout le monde, loin s’en faut. Espérons que les amateurs ne seront pas assommés par les 13 épisodes d’un bad trip qui aurait tout aussi bien pu exister en un long métrage sans doute un peu plus nerveux.

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