En tant que fan de comics (rappelez-vous ma récente étude de cas) inutile de dire que je pouvais difficilement faire l’impasse sur les séries de cette rentrée : avec Gotham et The Flash, c’est un peu Noël avant l’heure ! On avait Arrow côté DC Comics et Agents of S.H.I.E.L.D côté Marvel, mais voilà que DC met les bouchées doubles en dégainant coup sur coup les univers de Batman et celui du héros le plus rapide de l’univers. Tant de cadeaux pour les fans, c’est presque un peu suspect, vous ne trouvez pas ? Pour le savoir une seule solution, une confrontation au sommet. Aujourd’hui je vous propose une petite bataille des pilotes. Entre le super-flic James Gordon et la fusée humaine Flash, la lutte s’annonce intense. Les paris sont ouverts !
Round 1 : Le champion du charisme
A ma gauche, le flic le plus honnête, le plus dévoué de tous les comics, un modèle pour tous les hommes en bleu, j’ai nommé l’inspecteur Gordon venu tout droit de Gotham. A ma droite, l’homme le plus rapide du monde, la fusée humaine, The Flash Barryyyyy Allen. Ok, on calme la foule en délire, sur le papier le match s’annonce très très mal parti. Un super-flic contre un super-héros, ça s’annonce vraiment brutal. Pas équilibré ce match ? Et pourtant, il n’y a pas que le collant dans la vie, il y a le cœur aussi.
Gordon (Ben McKenzie) n’est pas un rigolo. Ancien militaire, fils de flic, le jeune inspecteur n’est pas là pour faire de la figuration. Sa mission : délivrer Gotham du crime et du vice. Motivé le garçon ! Et justement peut être trop. Ce Gordon est parfait, trop parfait. Pas de cadavre dans le placard, en tout cas pas pour l’instant, pas de doutes, pas de failles, on a presque envie qu’il lui arrive une saloperie pour mieux s’attacher à lui. Le jeu tout en force de Ben McKenzie a beau jouer en faveur de son côté flic modèle et droit, on ne peut s’empêcher de se dire qu’entre droit et raide il n’y a qu’un pas. Ce personnage peut-être un peu trop lisse manque encore de profondeur, espérons qu’il gagne quelques fêlures en cours de route, il n’en sera que plus attachant.
Barry Allen (Grant Gustin), avant d’être un guépard humain, est un jeune homme presque banal. Amoureux d’une fille mais incapable d’avouer ses sentiments, toujours en retard, Barry semble plus proche de Gaston Lagaffe que de Superman. Ça casse le mythe hein ? Et bien non justement, ça serait même plutôt le contraire. Plus Barry a du mal à comprendre ce qui se passe autour de lui, plus il nous est sympathique. Mélange improbable entre Peter Parker et Clark Kent, Barry est un super-héros qui se découvre. Attention il peut aussi énerver. Le voir faire son chien battu quand il comprend que la fille qu’il convoite est partie avec un autre, ça donne furieusement envie de lui mettre un taquet en lui disant « allez bouge-toi mon gamin ». Mais bon il est sympa quand même. Ce qui est intéressant, c’est l’énigme posée par le meurtre de sa mère. Oui je sais, un traumatisme pour un super-héros c’est un peu cliché, mais je vous jure que ça joue aussi beaucoup pour lui donner de la personnalité. Espérons que par la suite notre petit Barry ne se retrouve pas mangé par son alter ego en collant. Ce serait dommage qu’autant de bonnes intentions disparaissent en un éclair.
Vainqueur : Sans même avoir eu besoin de se servir de ses supers talents, Flash emporte la palme du charisme. Contrairement à Gordon qui fait surtout office de miroir face à son univers, Barry occupe le devant de la scène et cela, dès le départ. Bon travail donc, à confirmer au trimestre prochain.
Gotham 0 – The Flash 1
Round 2 : Amis et ennemis, être un héros c’est bien, être bien entouré c’est mieux
Barry a pris l’avantage en première manche mais attention mon petit, Gordon rameute des renforts.
Eh oui, qui dit flic dit partenaire, et là je dis attention, pour une fois le coéquipier pourrait bien voler la vedette. Pour prendre en main le jeune Gordon, il y a Harvey Bullock (Donal Logue). Un peu poivrot, un peu râleur, un peu tire-au-flanc, enfin bref une épave. On se demande même au début s’il n’est pas un peu corrompu. Malgré tout ça, Bullock est l’un des meilleurs personnages de ce pilote. On se rend compte entre deux coups de sang et trois lâchetés que ce flic est juste le meilleur guide possible pour Gotham. Non seulement il connait le monde du crime par cœur mais il complète parfaitement l’idéalisme de Gordon par une bonne dose de pragmatisme style vieux roublard. Et pour couronner le tout, il a un bon fond. Que demander de mieux ? Bullock c’est un peu l’incarnation de Gotham City, usé, fatigué mais toujours bon à sauver.
Quant aux autres personnages, ils prouvent une chose : innover pour une adaptation c’est toujours risqué mais ça peut aussi être très payant. Si on reconnait déjà en Bruce les prémisses de Batman, d’autres nous surprennent beaucoup plus. Alfred en majordome autoritaire hurlant sur Bruce quand il fait n’importe quoi, je peux vous dire que ça surprend. Même chose quand on s’aperçoit que c’est l’homme mystère qui tient le labo de la police de Gotham. Ça surprend, ça désarçonne, c’est plus ou moins fidèle à la mythologie mais peu importe, tous affirment déjà des traits de caractères qui ne demandent qu’à être poussés.

Edward Nygma cru 2014. Même sans savoir son nom on se doutait un peu quand même qu’il y avait quelque chose de bizarre chez mr l’expert.
La grande question qui reste à trancher, est celle des méchants. Ceux qui aiment les films de l’homme chauve-souris le savent bien, ce qu’il y a d’intéressant chez Batman ce sont souvent ces ennemis (même Mr Freeze chez Schumacher, c’est vous dire). Et bien bonne nouvelle, les promesses s’annoncent élevées. L’invention paye avec une Fish Moony (Jada Pinkett Smith) chef de mafia manipulatrice comme on les aime, et côté tradition, Gotham impose son Pingouin (Robin Lord Taylor) que n’aurait peut-être pas renié Danny DeVito. On voit sous nos yeux émus naitre la frustration, la couardise, la folie d’un psychopathe en puissance avec le jeune Cobblepot. Émouvant, vraiment, et surtout impeccablement joué. On en redemande et très vite de préférence.
Du côté de The Flash, la galerie des gentils se permet dès le début un petit clin d’œil amusant au passé. Le père de Barry Allen est interprété par nul autre que John Wesley Shipp, interprète du Flash des années 90. Ah… que de nostalgie ! Mais foin du passé, attaquons-nous au présent. La série présente un mélange de personnages plus ou moins fidèles aux comics -l’amour impossible Iris West (Candice Patton), le rival absolu Eddie Thawne (Rick Cosnett)- et des nouveautés comme la redéfinition complète du père d’Iris, l’inspecteur Joe West (James L.Martin). Étonnamment, c’est d’ailleurs lui qui s’en sort le mieux dans ce pilote dans le rôle de père d’adoption de notre héros, à la fois protecteur, plein de doutes, et complètement incrédule devant les phénomènes surnaturels qui se déroulent devant ses yeux.
Une chose est sûre, pas besoin d’être un fin connaisseur des aventures de Flash pour trouver ses marques. S’il faut bien reconnaître quelque chose à la série c’est bien ça, on progresse naturellement dans l’histoire avec des personnages qui font sens. Pourtant on s’ennuie un peu quand même. Il manque un petit charme, un peu plus de conflit ou de profondeur pour être totalement convaincu. Tout ce petit monde est presque un peu trop fade. Évidemment ça peut s’améliorer mais le nombre de personnages assez important contribue à diluer l’ensemble. C’est dommage, The Flash a du potentiel, mais ce n’est pas encore gagné.
Et les méchants ? Ils sont où ? Eh bien c’est le problème. Le super-vilain du jour s’appelle Clyde Mardon et au final on s’en fiche un peu. Que dire sur ce premier vilain ? Pas grand-chose au final, puisqu’à part le fait qu’il s’agisse d’un braqueur se prenant pour un dieu en déclenchant des tempêtes, il n’y a pas beaucoup de personnalité. Ce méchant m’a furieusement fait penser à ces ennemis interchangeables que l’on trouve dans Smallville : même rage, même absence de singularité et au final tout aussi inintéressant. Si c’est le modèle des futurs adversaires de l’homme qui court plus vite que la lumière, c’est un peu inquiétant. Gageons qu’il ne s’agissait que d’un petit pétard mouillé avant le feu d’artifice.
Vainqueur : Gordon revient à la corde et en attaque groupée ! En réinventant toute une galerie de personnages mythiques, Gotham prouve qu’elle n’est pas qu’une petite adaptation sans saveur. Et ça, j’achète !
Gotham 1 – The Flash 1
Round 3 : Et l’action dans tout ça ?
Et oui on parle de personnages, d’ambiance, c’est bien joli mais qu’est-ce qui se passe dans ces séries ?
Si quand on vous dit super-héros vous pensez feu d’artifices de pouvoirs, combats d’anthologie et explosions dans tous les sens, Gotham ne vous conviendra pas, circulez y’a rien à voir. Gordon, à part son super badge et sa super droiture n’est pas l’égal de Superman. En même temps ce n’est pas vraiment l’intérêt du monde de Batman. Malgré tout, si vous ne cherchez pas qu’à en prendre plein les mirettes, l’inspecteur Gordon et sa clique pourraient bien avoir quelques bonnes surprises à réserver. Au lieu de suivre le schéma classique d’un super-héros cherchant à maîtriser ses pouvoirs, on se retrouve ici avec une enquête bien ficelée pour découvrir qui sont les meurtriers des parents de Bruce Wayne. Une enquête qui sert d’initiation à Gordon face au monde de la nuit de Gotham City, ses mafieux, ses cinglés, bref toute la faune qu’affrontera plus tard le justicier chauve-souris.
Gotham parvient à combiner tous les ingrédients d’une bonne série policière (normal quand on sait que son créateur Bruno Heller est aussi celui de The Mentalist) et la mythologie d’un super-héros. Une recette plutôt bien menée, qui, loin d’être indigeste, pourrait même motiver les plus réfractaires aux comics à y jeter un petit coup d’œil.
En ce qui concerne The Flash, on est plutôt en terrain connu. On découvre comment Barry Allen devient un super-humain, comment il apprend à maîtriser ses pouvoirs et comment les mettre en application pour flanquer une bonne volée au méchant de service. Bon c’est vrai j’exagère le trait, entre temps des conflits personnels émergent, des doutes apparaissent. Mais globalement, on suit le schéma de Peter Parker/Spiderman, « de grands pouvoirs impliquent de grandes responsabilités ». Rien de mal à ça, on apprend peu à peu à découvrir un univers qui semble assez riche mais il n’empêche que The Flash devra s’affranchir de ce classicisme pour pouvoir convaincre sur le long terme. Comme on dit dans ces cas-là, qui vivra verra.
Niveau combats et effets spéciaux, rien à redire, c’est plutôt convaincant. L’idée d’avoir fait appel à des ralentis pour retranscrire la perception ultra rapide de Flash est notamment particulièrement bien vue pour faire passer les impressions du personnage. Des bonnes idées il y en a, reste à savoir si ces effets suffiront à convaincre. On ne peut que croiser les doigts pour que les intrigues et les antagonistes se montrent tout aussi impressionnants que les petites foulées de notre Usain Bolt encapuchoné.
Vainqueur : Malgré la force visuelle de The Flash, Gotham l’emporte pour la qualité de son intrigue. Moins classique et surtout beaucoup plus accrocheuse, la série nous emporte dans ses enquêtes. Décidément on a hâte d’en découvrir plus sur les secrets des nuits de Gotham City.
Gotham 2 – The Flash 1
Vainqueur final : Le combat fut rude et pourtant, sans super-pouvoirs mais avec toute son intelligence, Gordon l’emporte sur Barry Allen. Plus adulte, plus profond, plus immersif, l’univers de Gotham parvient à séduire et à donner envie de découvrir la destinée de Jim Gordon, de Bruce Wayne ou du Pingouin. Rien n’est joué mais tout ça est prometteur. On n’oubliera pas pour autant de surveiller de près The Flash, cependant il n’est pas certain que cette série révèle un aussi gros potentiel.