Etude de cas : les super-héros en séries

X-Men, Avengers, The Dark Knight… depuis une dizaine d’années les adaptations de comics se multiplient sur les écrans. Des plus connus aux plus confidentiels, tous les justiciers masqués ont droit à leur version filmique. Il faut dire que ces créations sont presque devenues un genre à part entière, n’ayant de cesse de truster les premières places du box-office. L’impact visuel des effets spéciaux a permis à ces films de devenir le modèle d’un type de blockbusters nouveau, misant sur un déferlement spectaculaire d’effets et d’action.
Et les séries dans tout ça ? L’apparition ces dernières années de shows tels que Arrow, Agents of S.H.I.E.L.D ou encore Gotham et Flash semble montrer que l’invasion des héros et des super vilains ne compte pas s’arrêter aux salles obscures. Une question se pose : comment les séries participent-elles à la création de ces mythologies modernes ? Permettent-elles d’atteindre un autre public ? Apportent-elles un point de vue nouveau sur nos comics favoris ? Ou bien sont-elles tout simplement un marché à conquérir pour des marques en quête de multiplication des ressources ? Pour répondre à toutes ces questions, un petit tour par l’histoire des séries de super-héros s’impose.

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Euh Batman, c’est vraiment nous les envahisseurs ?

Est-ce un oiseau ? Est-ce un avion ? Non c’est une série kitsch.

Dès 1952, à l’aube de l’histoire des séries, le plus célèbre de tous les héros de comics, Superman, connait sa première adaptation télévisée : The Adventures of Superman. Incarné par George Reeves, le dernier survivant de Krypton défend la veuve et l’orphelin en se battant contre la mafia et autres criminels de tout poil. Les extraterrestres et les ennemis aux pouvoirs démesurés, ce n’est pas encore pour tout de suite. Il faut dire que les effets spéciaux ne sont encore que balbutiants. Câbles, surimpressions et carton-pâte suffisent pour créer l’illusion des pouvoirs du héros extraterrestre.

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Ah là, c’est sûr ça décoiffe !

Cette première adaptation de Superman est créée à un moment difficile dans l’histoire des comics. Après une vague de succès pendant la seconde guerre mondiale avec l’exaltation du patriotisme, l’après-guerre voit le paysage de la bande dessinée changer aux Etats-Unis avec le succès de comics policiers et de BD romantiques. La période est aussi marquée par l’entrée des USA dans une période de méfiance généralisée avec le maccarthysme et plus encore de repli sur des valeurs morales traditionnelles dont les bandes dessinées vont faire les frais. La Comics Code Authority est instituée au début des années 50 pour bannir la violence et l’immoralité des pages des publications pour la jeunesse. Les parents craignent pour la santé mentale de leurs enfants. Il leur faut des modèles dans lesquels ils puissent avoir confiance. Vous l’aurez compris, c’est là qu’intervient Superman. Créée pour fédérer un nouveau public en accompagnant la diffusion de la télévision dans les foyers, la série se doit de refléter un message moral et de toucher un public jeune et familial. Dans son générique même, la série transmet cette volonté : « un héros menant une bataille sans fin pour la vérité, la justice et le modèle américain ». Le tout accompagné du héros posant fièrement devant un drapeau US, on fait difficilement plus patriotique.

Dès cette série pionnière, la question du public se pose. Cette série peut-elle toucher un public autre que les enfants ? Lors des premières saisons, elle semble tenter une approche plus sombre, plus violente parfois, avec la mort de certains personnages. Pourtant, très vite, elle amorce un virage vers plus de légèreté, plus d’humour, elle se fait plus consensuelle. Il faudra attendre encore un peu pour qu’un public adulte puisse y trouver son compte.

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Ah le rêve américain ! Tout un poème.

Apparue sur les écrans en 1966, la série Batman avec Adam West ne fait pas vraiment le pari non plus du réalisme et de la noirceur. Au contraire même. Batman repose sur une esthétique très, disons, personnelle. Couleurs pétantes, effets visuels à base de pow, de bang et de paf, costumes adaptés (trop) fidèlement des comics créent un mélange visuel détonnant. L’esthétique de la série transcrit à l’écran la fantaisie de l’univers visuel des comics, en nous immergeant dans un monde bariolé et délirant mais surtout diablement kitsch. Une esthétique qui n’est d’ailleurs pas très éloignée des recherches contemporaines du pop art, dans l’utilisation des couleurs et surtout dans cette manière très décomplexée d’assumer pleinement une certaine image de culture populaire.

Cette vision de l’univers de Batman, à des années lumières de celle de Christopher Nolan dans sa trilogie Dark Knight, reflète pourtant ce qu’étaient les personnages de comics dans les années 50 et 60. Batman n’a pas toujours été un justicier sombre et torturé, il a également été un héros haut en couleur s’adressant avant tout à la jeunesse. Avec Batman comme avec The Adventures of Superman, on est dans une conception de l’univers des super-héros comme un divertissement pour enfants. La séduction sur le jeune public s’opère par l’action, et surtout par l’humour. Si Superman proposait quelques moments drôles, la tendance s’épanouit complètement dans Batman. Répliques décalées, situations absurdes ou gadgets idiots, la série ne se prend jamais au sérieux. Presque trop d’ailleurs. A force de se caricaturer, Batman donne une image assez ridicule de ce que sont les comics. Difficile de prendre au sérieux des héros aussi kitsch ! Il reste encore beaucoup à faire pour sortir de l’image d’un divertissement gentillet.

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Au bal masqué, ohé, ohé !

A la fin des années 70, une nouvelle sorte de séries superhéroiques émerge. Wonder Woman et L’Incroyable Hulk apparaissent sur les écrans. La princesse amazone et le monstre vert inaugurent une nouvelle prise en compte de l’impact visuel dans les séries. Si les effets spéciaux sont encore loin des effets actuels, les acteurs choisis pour interpréter les personnages des comics ne sont pas que des acteurs aux physiques lambda, ce sont aussi des athlètes. Lynda Carter, incarnant Wonder Woman, est une ancienne candidate à l’élection de Miss Monde. Quant à Lou Ferrigno, l’interprète de Hulk, il est un culturiste accompli. La représentation des héros en action est aussi une démonstration physique, dès lors le corps devient essentiel dans la construction de ces icônes. Le collant ne suffit plus désormais : on entre dans une certaine recherche de la perfection physique.

Par ailleurs, ces deux séries ont aussi en commun d’inaugurer une nouvelle approche des héros, un peu plus complexe qu’auparavant. Wonder Woman et L’Incroyable Hulk ne sont pas que des justiciers musclés distribuant des baffes, ils gagnent aussi en complexité psychologique par rapport à leurs aînés. Bien sûr, on est bien loin de Twin Peaks, mais tout de même les héros commencent à se faire plus humains. La guerrière amazone se fait bien souvent la porte-parole du féminisme en luttant contre des hommes convaincus de la supériorité masculine. Voir une héroïne en costume adresser de véritables leçons de féminisme à des soldats nazis est d’ailleurs assez surréaliste, mais reste pourtant l’un des leitmotivs de la série. Cette mise en scène de l’héroïne présentée comme une femme forte qui en remontre à la gent masculine s’inscrit dans la même lignée que des séries comme les Drôles de Dames.

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On ne plaisante pas avec les atlantes.

Hulk, malgré la brutalité et la sauvagerie du personnage, est un héros complexe par sa nature même. Sorte de Dr Jekyll et Mr Hyde à la sauce US, le personnage est souvent confronté à l’ambiguïté de sa double identité dans les comics, entre le savant Bruce Banner et le monstre destructeur qu’il porte en lui. La série repose en grande partie sur ce principe. Banner, renommé David, est un homme vivant ses transformations comme une sorte de malédiction. Il est un héros schizophrène en fuite, constamment contraint de se cacher. Le début de la série le montre également sous un jour tragique en le présentant comme un homme traumatisé par la mort de sa femme. On est loin de l’image bon enfant d’un Superman.

La série fonctionne par la suite au gré des périples de Banner aidant son prochain grâce à ses pouvoirs tout en se cachant. Un principe bien connu puisqu’on le retrouve notamment dans Kung Fu, plus tard dans L’Agence tous risques ou dans Le Caméléon. Le super-héros s’adapte. La mythologie du Hulk luttant contre des ennemis surpuissants avec les Avengers paraît bien loin mais on retrouve ce rôle de modèle et de justicier si prisé dans les séries des années 70-80.

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C’est vrai que les effets numériques de nos jours ça aide un peu quand même.

Si ces séries sont des divertissements, elles n’oublient pas pour autant de donner une certaine épaisseur aux personnages. Par petites touches, les super-héros s’humanisent, gagnent en émotion et en sentiments. Cette évolution nous les rend aussi plus sympathiques. La perfection permet difficilement l’identification mais en se rapprochant de nous les héros deviennent des icônes plus accessibles.

Dessine-moi un héros.

Chez Séries Chéries nous n’avons pas vraiment vocation à parler de séries d’animation. Pourtant, aujourd’hui, nous allons faire une exception. Difficile de traiter de l’évolution de l’univers des comics à la télévision sans parler de dessins animés. Si les adaptations de comics en séries animées dans les années 60 et 70 n’ont pas vraiment constitué une révolution par rapport aux séries avec acteurs, il en va tout autrement de celles créées dans les années 90.

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Wolverine pré Hugh Jackman. Un personnage plutôt piquant.

L’avantage de l’animation, c’est tout d’abord la possibilité d’aller plus loin en termes d’effets visuels. Plus de contraintes techniques, le dessin animé permet toutes les fantaisies pour retranscrire en mouvement la déferlante d’action que l’on trouve dans les comics. L’action, c’est justement ce qui frappe le plus dans deux adaptations de Marvel apparues au début des années 90, X-Men The animated series et Spiderman l’homme-araignée. Si le dessin et l’animation de ces deux séries sont très loin d’être parfaits, ils sont les premiers à nous immerger dans l’intensité des combats propre aux comics. La mise en scène des phases d’action et des combats de superpouvoirs sont les prémisses des incarnations cinématographiques dans les années 2000. Visuellement, jamais les séries n’ont été aussi proches du matériau originel. Mais qu’en est-il de l’esprit ?

La bande dessinée X-Men n’est pas qu’une suite de combats contre des extraterrestres ou des supers criminels, c’est aussi une BD abordant des thèmes graves tels que le rejet, le racisme ou le droit à la différence. Pas facile de divertir des enfants tout en parlant de telles thématiques. Pourtant la série animée X-Men de 1992 ne fait l’impasse sur aucune d’entre elles. L’adaptation est d’une fidélité absolue à l’œuvre originale. Les thématiques violentes voire sociétales sont reprises telles quelles avec le moins de concessions possible. La galerie de personnages particulièrement riche de la bande dessinée est également reprise. Ce ne sont plus un ou deux personnages qui sont mis en avant, mais tout un univers. On dépasse le simple produit dérivé pour entrer dans la mythologie des super-héros.

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Le tisseur sait aussi s’entourer.

L’adaptation de Spiderman de 1994 se montre tout aussi fidèle que celle des X-Men. Ses amis, ses amours, ses doutes aussi sont traduits dans l’univers de la série. La saga du bouffon vert, la folie d’Harry Osborn ou la lutte contre Venom sont fidèlement reprises. La série animée nous permet de voyager en quelques saisons dans plus de 20 ans d’histoire des comics Amazing Spiderman. Grâce à ce dessin animé, on peut tout à fait maîtriser une grande partie du mythe de l’homme araignée sans jamais avoir ouvert une seule BD. Ces deux séries constituent des initiations à l’univers de Marvel, une superbe aubaine pour l’éditeur qui lui permet d’atteindre un nouveau public pas forcément habitué à la lecture de comics. Elles ont ouvert la voie aux films. De nouveaux fans des héros Marvel vont naître, totalement familiarisés avec toutes les subtilités de leurs héros préférés.

Les superhéros de DC Comics ne sont pas en reste, loin de là. Batman, Superman et La Ligue des Justiciers ont connu des adaptations tout aussi fidèles que celles des héros Marvel, voire plus encore. Mieux réalisées, mieux animées, ces adaptations proposent toute la richesse des personnages et des intrigues des Comics DC en ajoutant au passage une dimension supplémentaire et essentielle : l’émotion.

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La réunion syndicale est annulée messieurs.

La série Batman a particulièrement repoussé les limites de la série animée pour devenir une sorte de modèle de l’adaptation réussie. C’est l’une des plus belles réalisations autour du mythe du chevalier noir, tous médias confondus. Développée comme un prolongement des films de Tim Burton, la série s’inspire et s’affranchit de son modèle pour donner naissance à sa propre vision du mythe. Avec un univers se situant à la croisée du film de gangsters des années 40, du film noir et de l’expressionnisme, Batman se démarque des séries pour enfants en affichant un style et une mise en scène des plus cinématographiques.

Cette série offre une nouvelle évolution dans la manière dont sont caractérisés les personnages. Les ennemis bénéficient d’un traitement beaucoup plus subtil qu’à l’ordinaire. Double Face par exemple est montré comme un homme en lutte contre la folie, un homme en proie à un début de schizophrénie qui tente de réprimer ses tendances violentes pour préserver sa réputation, avant que le vernis ne craque violemment. Mr Freeze est un autre exemple particulièrement frappant. Auparavant montré comme un savant fou, notamment dans la série des années 60, Freeze voit ses origines repensées pour le dessin animée. Victor Fries est ici un scientifique qui cherche à trouver un remède pour sa femme gravement malade. Le mécène de ses travaux, mis en colère par les dépenses inconsidérées de son employé, sera à l’origine de la mort de la femme de Fries et de la transformation de celui-ci en un être glacial. Freeze ne deviendra un criminel que dans le but de se venger de l’homme ayant brisé sa vie. Cette réécriture nous permet d’entretenir un nouveau rapport avec le personnage. Le manichéisme trop souvent présent dans les intrigues de super-héros laisse ici la place à un intéressant rapport d’empathie avec le criminel. Ces réécritures auront d’ailleurs une influence sur les comics et même sur les films, dont le Batman et Robin de Schumacher qui reprend en partie le drame de Freeze (avec, il faut le dire, beaucoup moins de talent).

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Comme dirait Schwarzy, « ça va jeter un froid » !

Les séries animées ont apporté une dynamique nouvelle à l’adaptation des univers Marvel et DC. Par leur respect des œuvres originales, elles sont devenues des portes d’entrée parfaites dans ces univers complexes dont la durée pourrait rebuter un néophyte. Pour les fans, elles sont aussi devenues les symboles d’une prise en compte intelligente de la passion pour les comics. Légèreté et l’humour ne sont pas forcément les seuls ingrédients pour fédérer un public.

Vous faites quoi dans la vie à part sauver le monde ?

L’arrivée des effets spéciaux numériques à partir de la fin des années 90 change la donne dans le monde des super-héros. Désormais les séries animées n’auront plus le monopole des scènes d’action spectaculaires, les séries aussi vont pouvoir nous en mettre plein les yeux. Pourtant les effets visuels ne font pas tout. L’action pour l’action a ses limites, les feux d’artifices aussi. Les séries modernes devront relever le défi de ne pas être limitée à de simples démonstrations techniques. C’est par cette double recherche que l’on entre vraiment dans l’époque des séries modernes.

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Ne sont-ils pas mignons nos petits Lois et Clark ?

A la frontière du kitsch et de l’époque moderne, Lois et Clark, les Nouvelles Aventures de Superman apparaît sur les écrans en 1993. Il est vrai, l’époque n’est pas encore aux prouesses visuelles mais qu’importe, là n’est pas l’intérêt de cette série. Si les effets sont encore assez proches de ceux présents dans les films des années 70-80, ce qui compte avant tout ce sont les liens entre les personnages. La relation entre Clark et ses parents et surtout celle qu’il entretient avec Lois Lane (Teri Hatcher) sont au cœur de l’intrigue. Le nouveau Superman est bien différent de celui incarné par George Reeves. Interprété par Dean Cain, le nouveau surhomme de Krypton ne représente plus ce modèle américain trop lisse et trop parfait. Superman, ou tout du moins son alter ego Clark Kent, est devenu un homme sensible et réservé. On retrouve la tendance entamée avec L’Incroyable Hulk, en gagnant en humanité le personnage nous touche beaucoup plus. Il n’est plus une icône de marbre, un archétype éternel. Désormais le super-héros évolue, change, doute. Bref, il vit.

Le nom de la série reflète lui-même un changement dans la mise en scène du héros. Il n’est plus le seul personnage principal, Lois Lane a autant d’importance que lui. Finie, la femme impuissante attendant impatiemment d’être sauvée par son chevalier en collant, Lois Lane est désormais une femme indépendante qui peut très bien se débrouiller toute seule. Brillante journaliste, elle entre dans une relation de rivalité avec Clark Kent au début de la série avant d’être séduite par lui. Jusqu’à présent, les femmes dans les séries de super-héros n’avaient pas vraiment connu les honneurs et étaient le plus souvent des demoiselles en détresse ou l’objet de désirs. Wonder Woman avait déjà inauguré un certain changement mais le personnage restait tout de même assez caricatural, coincé entre son image sexy et ses velléités féministes. Pour la première fois avec Lois Lane, les séries de héros semblent vraiment s’adresser à un public féminin. L’histoire d’amour peut être tout aussi intéressante que les combats de super-pouvoirs. L’arrivée de la romance dans cet univers permet de sortir un peu de l’image d’un loisir pour ados attardés tout en enrichissant aussi la perception du mythe de l’homme d’acier.

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Un héros au cœur d’or.

Ce qui symbolise aussi l’entrée dans cette nouvelle ère des super-héros, c’est l’importance nouvelle accordée aux doubles identités. Le masque devient dès lors aussi intéressant que les aventures en costume. Lois et Clark s’inscrit dans cette volonté avec un Clark Kent plus présent, plus intéressant dans son travail de journaliste et dans son rapport avec la rédaction du Daily Planet. Smallville dans les années 2000 va aller encore plus loin dans l’exploration de l’homme qui se cache derrière la cape. Nouveau reboot des aventures de Superman, Smallville nous invite à découvrir l’adolescence du plus célèbre des héros. Nous retrouvons Clark au lycée, dans une période où il apprend à accepter et à se servir de ces pouvoirs. Comme dans la série des années 90, la romance occupe une part très importante de la série en montrant l’attirance et la déception amoureuse avec Lana Lang puis l’histoire d’amour avec Lois Lane.

La grande nouveauté apportée par Smallville est de prendre pour sujet un héros en formation. Superman n’existe pas encore, il n’y a que Clark Kent. Nous savons tous quel est le destin de Clark, mais comment en arrive-t-il à endosser le costume ? Son amitié avec un jeune Lex Luthor, son sentiment de trahison face à ses proches, ses doutes face à l’impossibilité de mener une vie normale viennent considérablement complexifier ce que l’on pensait savoir du héros. La série s’affranchit des comics pour proposer une vision inédite. Elle ne trahit pas pour l’autant l’esprit et la personnalité des personnages mais elle les réinterprète selon de nouveaux codes. Smallville accorde une grande place aux êtres qui entourent Clark. On quitte la perception d’un héros solitaire pour entrer dans son intimité avec ceux qui ont un impact sur ses choix et sur son destin.

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Rajeunir Superman et le rendre plus sexy. Mission accomplie non ?

Par la jeunesse de ses héros et son ton, la série s’adresse avant tout à un public adolescent. La série donne une image plus sexy à la licence, occasion idéale pour convertir un public nouveau. Pourtant Smallville n’est pas non plus qu’un divertissement pour ados, elle a su évoluer au cours de ses dix saisons pour se rapprocher de l’image traditionnelle que nous avons de Superman. La galerie des ennemis de l’homme d’acier apparaît peu à peu, les combats de pouvoirs se multiplient et nous rejoignons ainsi l’univers des films. Le terrain est prêt pour toutes les adaptations filmiques à venir.

Plus proche de nous et après le succès en salle des Dark Knight et autres Avengers, une nouvelle série est née pour transcrire à l’écran le destin d’un héros beaucoup plus méconnu de l’univers DC Comics : Green Arrow. Justicier milliardaire à mi-chemin entre Robin des bois et Batman, ce héros dépourvu de pouvoirs fait partie du paysage des comics américain depuis les années 40. Moins célèbre que Superman ou Wonder Woman, la série Arrow lui offre une toute nouvelle mise en lumière.

Arrow a été conçue au moment du succès de la franchise Dark Knight de Christopher Nolan. Difficile de l’oublier au vu des similitudes des deux univers. Si les deux personnages ont déjà beaucoup en commun, l’esthétique même de la série se rapproche de celle du chevalier noir. Oliver Queen et Bruce Wayne sont tous deux héritiers de multinationales, tous deux ont pour couverture leur image de playboys bons vivants, mais surtout ils ont l’un comme l’autre fait le choix de lutter contre le crime à la suite d’un traumatisme. Pour Queen, le traumatisme survient lors d’un naufrage dont il sera le seul survivant après que son père se soit suicidé devant ses yeux en lui avouant qu’il était un être corrompu. Sympa comme entrée en matière, on sent tout de suite que la franche rigolade sera au programme. L’univers d’Arrow est aussi sombre, réaliste et violent que celui du Batman de Nolan. Les collants étant passés de mode, bienvenue dans le monde moderne. Arrow ne semble plus viser le public traditionnel des super-héros. C’est une série adulte, fondée sur la quête de vengeance et de justice d’un homme torturé. Si la morale continue de prévaloir, le héros se radicalise désormais pour assouvir ses objectifs, Green Arrow n’hésitera pas à tuer quand il le faut. On franchit un palier dans la manière dont sont montrés les super-héros. La montée de la violence dans les séries semble avoir contaminé le monde des héros masqués, l’idéalisme n’est plus de mise.

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Ok, on arrête de me comparer à Batman maintenant ?

Comme dans Smallville, ce n’est pas l’action qui fait tout l’intérêt d’Arrow. Les retrouvailles compliquées de Green avec sa famille, les trahisons, le drame qui l’a séparé de son ancienne copine ou ses relations d’amitié et de confiance sont tout aussi importants que ses combats. On suit le destin d’un homme cherchant à recréer un nouvel ordre dans sa vie. Oliver Green a beau être un peu monolithique, on s’attache tout de même à son combat parce qu’il a des failles. Les héros peuvent aussi se montrer sous un jour beaucoup plus sombre, on est bien loin de la perfection.

Autre philosophie, autre éditeur : Marvel’s Agents of S.H.I.E.L.D. La série nous invite à suivre les missions d’une équipe du S.H.I.E.L.D. chargée d’enquêter sur les événements surnaturels. Le rapprochement avec les films est ici clairement affirmé puisque la série est un spin off de l’univers filmique de Marvel. Les clins d’œil et les références aux Avengers, à Thor, à Iron Man ou à Captain America abondent. L’un des personnages principaux, l’Agent Coulson (Clark Gregg) est directement issu des films tandis que quelques caméos (Nick Fury notamment) reviennent à plusieurs reprises nous rappeler que nous sommes bien dans une sorte de suite d’Avengers. L’esthétique et l’humour du film sont d’ailleurs bien présents. Rien d’étonnant à cela puisqu’on retrouve à la création de cette série Joss Whedon, le réalisateur des Avengers. On entre avec cette production dans une nouvelle conception de la série TV comme extension d’une marque. Marvel est devenu une franchise s’exprimant sur tous les médias, Agents of S.H.I.E.L.D. fait partie d’une stratégie globale.

ABC's "Marvel's Agents of S.H.I.E.L.D." - Season One

Non ce n’est pas une adaptation de Men in Black.

L’originalité de la série, au-delà de son positionnement comme spin-off, repose sur son concept. C’est une série de super-héros sans super-héros. On pourrait plutôt parler d’un nouveau regard sur la mythologie Marvel. L’agent Coulson, Skye, May, Ward et les savants Fitz et Simmons n’interagissent que rarement avec des personnages dotés de super pouvoirs. Leurs missions concernent principalement des artefacts asgards, des armes aliens, ou des complots de l’organisation terroriste Hydra. Les supers sont présents en toile de fond mais notre regard se porte sur les à-côtés, sur une dimension beaucoup moins connue de cet univers. Familiarisés avec ces récits, nous n’avons plus besoin d’apprendre les dilemmes que traversent nos héros préférés, l’univers peut prendre vie et s’enrichir en suivant des personnages « normaux ». Si l’évolution de l’intégration de la série à un univers plus large est intéressante dans son principe, espérons que nous ne tomberons pas dans le piège marketing d’un produit dérivé sans prise de risque et sans originalité propre. Une remarque qui vaut également pour une nouvelle série de cette rentrée, Gotham, montrant la ville du chevalier noir depuis le point de vue d’un jeune Jim Gordon.

Une réponse à “Etude de cas : les super-héros en séries

  1. Quel article ! L’égalité homme-femme ça ne concerne pas non plus les super héros… J’ai entendu dire qu’une série sur SuperGirl était en projet.

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