Qui n’a jamais rêvé un jour de prendre le pouvoir sur le temps ? Voyager vers le futur ou modifier des évènements passés pour mieux reconstruire le présent, ce serait tentant n’est-ce pas ? Si vous aussi vous avez toujours rêvé de connaitre d’autres époques voire d’autres réalités, alors je vous propose un petit voyage nostalgique made in Séries Chéries. Code Quantum, Sliders, Demain à la Une ; trois séries, trois styles très différents et trois manières de parler du temps passé, présent et futur.
Code Quantum : le visiteur du passé
Lorsqu’on parle de séries de science-fiction, on ne peut pas vraiment dire que la fin des années 80 ait été une période faste pour le genre. A part Red Dwarf en Angleterre et l’inusable Star Trek, les amateurs de SF étaient plutôt délaissés. C’était sans compter sur une série sans prétention, apparue en 1989 et restée culte depuis lors : Code Quantum. Nul besoin de vaisseaux spatiaux, d’extraterrestres de toutes formes ou de planètes lointaines, Code Quantum repose sur un concept simple : un scientifique (Sam Rockwell alias Scott Bakula) ayant découvert le moyen de remonter le temps lutte pour retourner à son époque tout en surmontant les épreuves du passé.
Série de science-fiction très classique par son principe, Quantum Leap aborde le voyage temporel d’une manière pourtant assez novatrice. Sam n’est pas le sauveur ou l’élu débarquant du futur pour bouleverser l’époque qu’il investit. L’originalité de la série repose en grande partie sur l’idée que son âme seule voyage en prenant possession d’un homme ou d’une femme de l’époque dans laquelle elle atterrit. Cela n’a peut-être l’air de rien mais cette idée modifie totalement la perspective. Sam doit se familiariser avec les difficultés, les épreuves qu’un individu rencontre par rapport aux problématiques de son époque. Au lieu d’envisager un passé historique dans son ensemble, on assiste plutôt à une suite de points de vue individuels qui permettent de comprendre tous les enjeux traversés par l’Amérique des années 50 jusqu’aux années 70. Du racisme à la condition des femmes en passant par la guerre du Vietnam, de nombreuses facettes de l’évolution de la société américaine nous sont dévoilés par un kaléidoscope de situations très éloignées les unes des autres mais qui pourtant parviennent à en dire beaucoup sur l’histoire des États-Unis.
Du point de vue dramatique, le principe est évidemment répétitif pourtant le changement total de cadre et de problématique dans chaque épisode parvient à renouveler constamment l’intérêt de la série. Un peu de surprise, parfois, ça change tout. On en viendrait même à regretter que Code Quantum reste aussi centré sur l’histoire récente des USA. Imaginez un peu Scott Bakula en pleine Inquisition, ou confronté aux guerres romaines de l’Antiquité ! Dommage, on restera sur notre faim à ce niveau-là.
Ce qui rend cette série attachante c’est aussi son duo de personnages principaux. Sam n’est pas seul à jouer les bons samaritains du futur. A ses côtés on retrouve Al (Dean Stockwell), hologramme chargé de transmettre toutes les informations utiles à Sam pour se sauver de toutes les situations périlleuses. Loin d’être cantonné au rôle de robot rigide, Al serait plutôt la pincée de fantaisie de chaque épisode. Son côté pince sans rire, son ironie, voire même son cynisme, en font le contrepoint idéal de Sam. Un héros sans peur et sans reproches c’est bien beau, mais ce serait ennuyeux sans une touche d’humour. Al est indispensable, à tel point d’ailleurs qu’on en vient à attendre chacune de ses apparitions avec impatience.
Une vision du passé plurielle et réaliste, un ton à la fois drôle et attachant, Code Quantum serait-elle donc la série parfaite ? Évidemment la nostalgie ne fait pas tout oublier et force est de reconnaitre que la série a vieilli. Malgré tout, elle reste tout à fait regardable aujourd’hui car son propos n’a pas pris une ride. En nous faisant réfléchir sur les destinés individuelles et sur les choix qui modifient le monde autour de nous, la série conserve toute sa pertinence. Code Quantum délivre en tout cas une vision très intéressante du passé, tirant le meilleur de son principe à travers la grande comme la petite histoire. Une série à découvrir ou à redécouvrir.
Sliders : partir un jour, sans retour
Voyager dans le passé pourquoi pas, mais tout de même on reste en terrain connu. Que diriez-vous d’explorer des univers inconnus, où tout serait possible ? Que diriez-vous de partir à la découverte de mondes parallèles ? Voici à peu près le concept d’une série culte des années 90, Sliders. L’histoire est celle d’un petit groupe de 4 personnes emmenés par Quinn Mallory (Jerry O’Connell), étudiant en physique et génial inventeur d’un appareil permettant de voyager entre univers parallèles : le minuteur. Évidemment, tout va très vite mal tourner et nos héros vont se retrouver prisonniers des voyages interdimensionnels, condamnés à « glisser » de monde en monde pour retrouver un jour leur monde d’origine.
Les visions du temps que nous offre Sliders pourraient se rapprocher de présents alternatifs. Nous sommes à la même époque mais un petit quelque chose a entraîné une évolution totalement différente de notre monde. On découvre ainsi un monde dans lequel la Guerre froide est gagnée par le communisme, un autre où les dinosaures n’ont jamais cessé d’exister ou encore un monde dans lequel les hommes sont en voie d’extinction. On oscille entre l’uchronie, avec des mondes répondant aux règles de notre univers mais aux Histoires différentes, et des mondes beaucoup plus fantaisistes où l’on peut trouver aussi bien des zombies, des druides magiciens ou des femmes à barbes.
Comme pour Code Quantum, le concept même de Sliders permet un dépaysement complet à chaque épisode. On ne sait jamais quelle nouvelle fantaisie nous attend, élément de surprise qui participe grandement au charme de la série. Au niveau du fond il faut bien avouer que le principe est plus ou moins bien exploité au fil des épisodes. Mais lorsque la spécificité d’un des mondes n’est pas juste un cadre exotique mais le sujet même de l’épisode, on peut se retrouver devant une vraie réflexion, un vrai questionnement sur notre réalité. Un monde où l’inégalité hommes-femmes est renversée ou un autre dans lequel les antibiotiques n’ont jamais été inventés permettent de parler de problèmes forts comme la discrimination ou le problème de l’inégalité face à l’accès aux soins. Le présent fantasmé peut être aussi utilisé comme réflexion comparative et Sliders prouve ainsi au passage qu’elle est parfois une série intelligente.
Ce qui fait aussi l’originalité de Sliders, c’est son équipe de héros. Au lieu d’avoir un ou deux personnages principaux autour desquels tout s’articule, on se retrouve ici avec quatre points de vue différents pour vivre ces voyages. Et autant le dire tout de suite, on n’est pas dans l’Agence tous risques : l’esprit d’équipe a du bon mais tout ne se déroule pas toujours sans accrocs. Ces personnages n’ont rien de héros, ils ont des faiblesses qu’ils vont devoir dépasser pour accomplir leur périple. Rembrandt (Cleavant Derricks) est un personnage assez lâche au début de la série. Il ne cesse de reprocher à Quinn la situation dans laquelle ils se retrouvent, incapable d’assumer lui-même sa part de responsabilité. Pourtant, au fil des saisons, il évoluera pour devenir un élément protecteur, voire même un leader à part entière à la toute fin de la série.
Ce qui est paradoxal avec cette série c’est que toutes les qualités dont je viens de parler vont toutes se retourner pour se vider de leur sens à partir de la saison 4. Le principe du saut de monde à monde finit par devenir un problème. A force de recommencer à chaque nouvel univers on a un peu l’impression d’être nous-mêmes bloqués dans une spirale sans fin. La bonne idée finit par devenir un peu énervante et on finit par avoir hâte que ça se termine. Apparemment les spectateurs n’étaient pas les seuls à en avoir un peu marre puisque quasiment tout le casting de départ disparait, à l’exception de Cleavant Derricks, y compris celui qui était quand même le leader, Quinn Malory. Et c’est là qu’on atteint le génie. Qu’ont fait les scénaristes ? Pour ne pas se passer du personnage de Quinn, ils l’ont bien sûr fait jouer par un autre acteur mais pour expliquer le changement physique, l’âme du Quinn original fusionne avec un double d’un autre monde au corps différents, le tout aboutissant à une situation où les deux Quinn vivent dans le même corps. Comme si ça n’était pas suffisant, la quête principale du groupe devient la recherche d’un moyen de délivrer l’âme de Quinn. C’était la dernière saison et je crois qu’effectivement il n’était pas le seul à mériter d’être délivré.

Pas la peine de nous regarder comme ça, vous avez tous les trois fui de la série. En même temps vous n’aviez pas tort…
Demain à la une : Gary un ami qui vous veut du bien
Pas de voyage dans le temps ou de quête interdimensionnelle dans Demain à la Une. On est bien loin de la science-fiction et pourtant, cette série nous parle elle aussi du temps. Cette fois, c’est le futur immédiat qui est à l’honneur. La série nous fait suivre les aventures de Gary Hobson (Kyle Chandler), un homme pour qui tout commence assez mal. Plaqué par sa femme, mis à la porte de chez lui, déçu par son travail d’agent de change, Gary cherche un sens à sa vie. Une direction qu’il va bientôt trouver devant la porte de sa chambre d’hôtel. Tous les matins, Gary va trouver un journal sur le pallier. Un journal qui ne semble avoir rien de particulier sauf un léger détail, il est daté du jour suivant. Grâce à lui Gary est capable de prévoir les évènements à l’avance et ainsi d’empêcher les drames à venir. Il est désormais investi d’une mission. Gary devient le sauveur de son prochain, le bon samaritain, l’homme qui tombe à pic pour changer les destins.
Le concept de la série rappelle beaucoup celui de Code Quantum. Dans les deux cas, le personnage est investi d’un objectif qu’il doit réaliser en un minimum de temps. Pour Gary Hobson comme pour Sam Rockwell, aider son prochain devient un mode de vie. Mais ce qui les sépare, c’est le rôle d’anti-héros ultime incarné par Gary. Sam Rockwell n’était pas à proprement parler un modèle héroïque non plus mais il était tout de même l’inventeur du voyage à travers le temps, il n’était pas seul puisqu’il était secondé d’Al et du super ordinateur Ziggy, bref il savait ce qu’il faisait. Hobson en revanche semble perpétuellement en train de lutter pour tenter de surmonter la masse de problèmes qui ne manquent jamais de lui tomber dessus. Il n’a rien d’un surhomme, c’est juste un type comme vous et moi avec ses faiblesses, ses limites, ses amis pleins de bonnes volontés. Si cette série nous a marqués c’est sans doute parce que rarement un personnage n’a été aussi proche du quotidien.
Le message de Demain à la Une est particulièrement porteur d’espoir. La lutte de Gary est avant tout un combat contre l’indifférence. Courir partout comme il le fait pour arriver à contrecarrer le destin se résume à un don de soi pour protéger un inconnu. Un message peut-être un peu naïf mais qui peut faire du bien dans un paysage de séries où la figure de l’entraide se résume surtout à Joséphine Ange Gardien.
Évidemment la série n’est pas sans défaut. Les épisodes n’ont pas vraiment le rythme d’un 24h chrono. Mais peu importe, ce qui reste pertinent aujourd’hui avec Demain à la une c’est la question des choix par lesquels on transforme notre destinée. Plus encore que la question du temps, c’est cette notion de choix qui traverse ces trois séries. Comme si le temps n’était finalement qu’une suite de décisions. Demain à la une parait aujourd’hui extrêmement naïve et sans doute trop simpliste, pourtant son principe reste efficace. Il manque peut-être juste un peu de conflit et de doute pour en faire quelque chose d’indémodable.