Mai 2007, ABC présente les pilotes des ses futures séries de la rentrée. Entre Private Practice et Dirty Sexy Money, une dramédie* sort du lot : Pushing Daisies.
Un conte de fée macabre
Pushing Daisies c’est l’histoire extraordinaire de Ned (Lee Pace), pâtissier de son état, qui a le don incroyable de faire revenir les morts à la vie par un simple toucher. Ce pouvoir, à la fois vécu comme une malédiction et comme une aubaine, lui permet de résoudre des meurtres. Accompagné du détective privé Emerson Cod (Chi McBride), il pointe régulièrement à la morgue afin de réveiller les défunts et leur demander des détails sur ce qui les a amenés à passer de vie à trépas.
Dans son quotidien, Ned est également entouré de son golden retriever, Digby, et de la serveuse qui travaille pour lui dans sa pâtisserie, Olive (Kristin Chenoweth). Son chien fut le premier à profiter de son don de résurrection, mais attention : un premier toucher ramène à la vie, un second tue définitivement. Digby ne doit donc en aucun cas entrer en contact physique avec son maître sous peine de rejoindre illico le cimetière canin. Olive de son côté est l’employée et l’une des rares amies de Ned. Elle a une forte attirance pour lui mais, à son grand malheur, celui-ci ne lui retourne jamais son affection. Toujours enjouée, ce petit brin de femme est unique. C’est la plus barrée de tous et indéniablement le personnage le plus folklorique de la série.
Lors d’une enquête, Ned décide de ramener à la vie et de façon permanente son amour d’enfance, Charlotte “Chuck” Charles (Anna Friel) qu’il ne peut se résigner à enfermer dans un cercueil. Chuck, toute ravie qu’elle est d’être de retour dans le monde des vivants, est donc condamnée à côtoyer l’homme de sa vie sans pouvoir profiter avec lui d’une vraie vie de couple. Et ce ne sera pas son seul souci : elle devra cacher son retour à ses tantes (Swoosie Kurtz et Ellen Greene), sous peine de dévoiler le secret de Ned, et trouver de nouveaux repères pour s’accommoder à de sa résurrection.
Du rire, des larmes et des sentiments, le tout enveloppé par des décors vintage, c’est la recette Pushing Daisies.
Des ressorts comiques là où on ne les attend pas
Le titre “Pushing Daisies” vient de l’expression anglaise “Pushing up the daisies” faisant référence en français à l’expression “manger le pissenlit par la racine”, soit une manière élégante d’exprimer le fait qu’une personne est morte et enterrée. La mort et les questions qui l’entourent semblent tenir à cœur à Bryan Fuller puisque sa création précédente, Dead Like Me, racontait le quotidien d’une faucheuse d’âmes. Pushing Daisies devait d’ailleurs en être le spin-off.
Pépite d’humour noir, les circonstances dans lesquelles meurent les pauvres victimes sont complètement absurdes. Il est impossible de ne pas sourire face à la créativité déployée par les scénaristes et le responsable des effets spéciaux. Aussi affreuse soit-elle, la mort est toujours traitée avec humour. Le ridicule ne tue pas mais on peut bien mourir de manière ridicule. Et le pire, c’est que ça laisse des traces…
Pour rajouter au côté insolite de la chose, la série s’est dotée d’un narrateur pour conter les péripéties de ses héros. Narrateur omniscient, il ausculte les personnages, les situations présentes et passées, et nous gratifie tantôt d’anecdotes rigolotes tantôt d’événements tragiques. Son flegme surprend et accroît la dimension comique de la série. Sa faculté à replacer les faits dans le temps à la seconde près est limite angoissante et nous rappelle sans cesse le temps qui passe, le temps qui rapproche les protagonistes d’une fin inévitable.
Une comédie funèbre haute en couleur
Mélange entre comédie romantique et polar, Pushing Daisies réserve une dernière bonne surprise : les intrigues glauques au possible sont enrobées dans l’univers charmant et poétique de la série, ce qui dédramatise considérablement les situations. Si ces mêmes crimes avaient pris place dans des séries réalistes de type Les Experts, ils seraient difficilement supportables à raconter. Quelle curieuse idée d’intégrer des histoires macabres dans un monde imaginaire, presque enchanté ! C’est en cela que la série est originale et attractive.
La ville imaginaire de Coeur d’Coeurs possède une atmosphère vraiment très particulière : les paysages naturels sont anormalement vifs et éclatants comme si on les avait coloriés, les maisons ressemblent à des maisons de poupées et le centre-ville recèle de boutiques et d’entreprises complètement déjantées que l’on découvre au gré des investigations. A chaque début d’épisode on se demande dans quel petit monde on va atterrir, quelle enquête et quel homicide cocasse on va nous proposer. A vrai dire, il y en a pour tout les goûts, de la chocolaterie au cirque en passant par le restaurant chinois.
La série est très réussie sur le plan esthétique. Inspirée des univers du film français Amélie Poulain et du réalisateur Tim Burton, il s’agit d’un véritable ovni télévisuel. Sa fantaisie séduit ou écœure mais ne laisse personne indifférent.
Pushing Daisies c’est 42 minutes d’enquête(s) au milieu de tartes gourmandes, de personnages attachants et de lieux atypiques. Série prometteuse, elle n’a connu que deux saisons. La première a été raccourcie à 9 épisodes (au lieu de 13) pour cause de grève de scénaristes, la seconde, moins aboutie, n’a pas convaincu. Après avoir connu une suite en bande-dessinée, des rumeurs courent sur un projet de comédie musicale. Rien d’étonnant à cela quand on sait que certaines des actrices ont déjà poussé la chansonnette dans la série (Kristin Chenoweth, Swoosie Kurtz et Ellen Greene)…
Cette série donne faim aussi parfois.