Madame est servie vs Une nounou d’enfer

Madame est servie et Une nounou d’enfer ne se contentent pas d’être deux célèbres sitcom américaines branchées sur la vie de famille, elles partagent à peu près le même synopsis. Un hominidé (de genre masculin pour Madame est servie, de genre féminin pour Une nounou d’enfer) issu d’un milieu populaire débarque dans une maison cossue pour devenir employé-e de maison. Suintant la joie de vivre, cette sorte de Mary Poppins des temps pas si modernes (Madame est servie a été tournée dans les années 80, Une nounou d’enfer dans les années 90) va amener la bonne humeur au sein d’un foyer tristounet et ravir le cœur esseulé d’un-e boss qui a tout misé sur sa carrière, délaissant sa famille. Mais qui gravira le podium de cette battle de séries de février ? Tony Micelli – héros de Madame est servie – et son équipe, ou Fran Fine – nounou d’enfer éponyme – et sa clique ?

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Tony Micelli et Angela Bower dans une sordide tentative d’influence de la rédaction de Séries Chéries.

Round 1 : L’employé du mois

En terme d’efficacité, Tony est le meilleur. L’italo-américain de Madame est servie sait aspirer, épousseter, bricoler, jardiner, repriser, mitonner des bons petits plats et s’occuper des gosses : cette « bonne à tout faire », comme il aime à se définir, se démène pour faire du pavillon de sa patronne Angela Bower un home sweet home de premier choix. La nounou d’enfer passe quant à elle une grande partie de ses journées à glander, n’étant assignée qu’à la prise en charge des trois têtes blondes (qui se gèrent plutôt bien toutes seules) de son richissime employeur Maxwell Sheffield. Pour le reste (cooking, cleaning, bitching…) il y a Mastercard Niles, le maître d’hôtel. Mais ce n’est pas sur ces critères d’excellence professionnelle que peut être sélectionné l’employé du mois, mais sur l’intérêt du personnage. Tony séduit par sa propension à casser les codes. Ce champion de baseball reconverti dans la domesticité mélange les ficelles de la grosse virilité et de la féminité traditionnelle. Bien dans ses pompes, il assume complètement d’occuper un poste culturellement assigné aux femmes et le bien-être de sa fille, Sam, reste son principal objectif. Fran est quant à elle hyper archétypale. Cette ex-représentante en cosmétiques condense tous les poncifs de la pintade : abonnée ad vitam aeternam à un âge inférieur à trente ans, elle a pour seul horizon le mariage. Rebutant sur le papier car très cliché, ce personnage n’en est pas moins extrêmement sympathique. Car Fran a un côté « vieux sage ayant roulé sa bosse ». Bourrée de confiance en sa propre expérience de la vie (obtenue au travers des shows télé et des potins de la maison de retraite de sa grand-mère) elle n’en finit pas de dispenser ses conseils expansifs plus ou moins avisés. Naturelle, bienveillante et drôlatique, elle s’adapte à toutes les situations et finit par se faire accepter dans tous les milieux.

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Fran Fine au travail.

Vainqueur : Impossible de départager l’homme de maison à la voix de bulldozer aviné et sa consœur nasillarde.

Madame est servie 1 – Une nounou d’enfer 1

Round 2 : De l’irrésistibilité des personnages secondaires

La demeure où officie la nounou d’enfer voit défiler un cortège de caractères hauts en couleur, au premier rang duquel le sarcastique maître d’hôtel et l’acariâtre associée de Maxwell CC (prononcer Sissi) qui sont engagés dans une lutte sans merci pour quicher la tête de l’autre. La longue lignée de juifs errants à laquelle appartient Fran semble quant à elle s’être arrêtée dans la cuisine des Sheffield et entend bien y rester. Respectivement gloutonne et sénile, la mère Sylvia et la grand-mère Yetta n’en finissent pas de promener leur vulgarité de middle class légèrement parvenue sur les murs bourgeois des Sheffield. Côté Madame est servie, nous souhaitons rendre hommage au personnage de Mona, la génitrice de la patronne, qui vient régulièrement apporter à la sitcom sa pêche et ses tendances nympho, dessinant les contours d’un troisième âge rigolo et libéré. Démolissant régulièrement sa fille à coup de tendres piques acerbes, elle est l’initiatrice de LA phrase que ma mère me répète depuis la nuit des temps : « je t’ai créée, je peux aussi te briser. » Un personnage super cool qui ne fait pas oublier que l’action de Madame est servie donne une trop large place aux enfants de Tony et Angela. Et nous sommes de ceux qui trouvent les marmots de sitcoms assez relous…

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Sissi face à son festin.

Vainqueur : On adore le caractère outrancier des seconds couteaux d’Une nounou d’enfer, qui frisent la comédie de boulevard.

Madame est servie 1 – Une nounou d’enfer 2

Round 3 : Meilleurs costumes

Côté Madame est servie, c’est le charme vintage qui opère sur le spectateur des années 2010. On adore les looks teenage casual de Sam et les fringues d’Angela «ayant réussi l’amalgame de l’autorité et du charme», comme dirait un célèbre Michel. L’éminente pubarde arbore en effet un style de pure businesswoman : lunettes carrées bouffant la moitié du visage, épaulettes, chemisier blousant, teintes mordorées… qui piquent délicieusement les yeux. Dans Une nounou d’enfer, deux écoles de style s’opposent violemment dans une perspective très théâtrale : les fringues classiques de la très british (et ennuyeuse) famille Sheffield (costumes de pingouin pour le père et uniformes pour les bambins) contrastent avec les tenues exubérantes du clan de Fran. Les femmes de la famille Fine portent fièrement la micro-jupe, à l’exception de grand-mère Yetta, qui préfère mixer pantalon de jogging et veste à paillettes pour un confort trendy. Le père de Fran – souvent évoqué mais jamais montré – se résume quant à lui à une moumoute égarée apparaissant de temps en temps à l’écran. Même les canapés sont habillés avec goût : ils trônent au milieu du salon de la mère de Fran, encore recouverts de leur film plastique, détail beauf par excellence.

Yetta

Diamant sur canapé.

Vainqueur : Egalité encore. La classe appelle la classe.

Madame est servie 2 – Une nounou d’enfer 3

Round 4 : Enjeux les plus intéressants

Côté Madame est servie, l’enjeu est de taille : la construction d’une famille recomposée. Veuf, Tony a emménagé dans la maison Bower avec sa fille sous le bras. Divorcée, Angela a un fils. Épisode après épisode, il va être question de rapprocher ces êtres pour en faire un clan uni, où les parents pourraient devenir un couple et les enfants frères et soeurs. Une entreprise qui passe par une nécessaire mise à égalité des personnages, en dépit de leurs milieux sociaux divergents et de leurs choix de carrière antithétiques. De manière subtile, les protagonistes vont développer des points communs et vont beaucoup s’influencer : Angela va retrouver le  goût de la vie de famille (sans rien abandonner de sa carrière) et Tony va reprendre ses études (sans renier son côté fée du logis). La nounou d’enfer – qui n’a pas d’enfants – apparaît de son côté très vite comme la mère idéale pour les marmots Sheffield en mal d’attention et comme l’étincelle funky qui manque à la vie du papa. Le spectateur n’a aucun mal à imaginer Fran Fine et Maxwell Sheffield se rapprocher tant leurs personnalités apparaissent opposées en terme de caractère et de cliché de genre. Et on sait qu’opposition rime bien souvent avec complémentarité dans les fictions amoureuses tradi. Du début à la fin du show, les héros vont rester figés dans leurs univers respectifs : l’homme – austère – au bureau, la femme – excentrique – au foyer ou dans les boutiques. La réussite sociale de Mr Sheffield reste surplombante, tandis que Fran a le monopole de l’irrésistibilité.

madame est servie family

Tony Danza rêvant au brillant avenir d’Alyssa Milano. Malheureusement l’amour ne suffit pas toujours.

Le vainqueur : Madame est servie emporte haut la main cette manche. N’en déplaise à Fran la magicienne, une famille en or, ça se travaille !

Madame est servie 3 – Une nounou d’enfer 3

Vainqueur final

Match nul entre les deux sitcoms. Si Madame est servie est à bien des égards plus originale (voire complexe), Une nounou d’enfer nous semble beaucoup plus amusante par son côté vaudevillesque outrancier (sans oublier que Dr Quinn, star entre toutes les stars, y fait une apparition remarquée).

Le saviez vous ? Presque dix ans avant de créer et d’interpréter le rôle titre d’Une nounou d’enfer, Fran Drescher faisait ses débuts, toute d’aigue-marine vêtue et le cheveu à plat, dans deux épisodes de Madame est servie.

Et si vous en voulez encore, nous nous sommes aussi intéressés aux carrières respectives de Fran Drescher et Tony Danza.

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