A la loupe : The Wrong Mans ou l’espionnage pour les nuls

Loin des fresques au long cours, des marathons sans fin d’épisodes que l’on ne compte plus, il y a des mini-séries qui semblent faites pour être dégustées d’une traite, sans reprendre son souffle et sans en laisser une miette : c’est le cas de The Wrong Mans. Une première saison de 6 épisodes de 30 minutes plus 2 épisodes d’une heure pour boucler l’aventure ont suffi pour faire de cette curiosité britannique une série événement en Grande Bretagne. Arte ne s’y est d’ailleurs pas trompée en programmant il y a quelques semaines une soirée marathon pour découvrir l’intégralité de la première saison. Tout ça c’est bien beau, mais The Wrong Mans est-elle vite vue, vite oubliée ou bien est-ce LA curiosité à découvrir sans tarder ?

Programme Name: The Wrong Mans - TX: n/a - Episode: Episode 1 (No. Episode 1) - Embargoed for publication until: n/a - Picture Shows:  Sam (MATHEW BAYNTON) - (C) BBC - Photographer: Des Willie

Le début de l’enfer ? Simple comme un coup de fil.

Être témoin d’un accident de voiture ça peut mener loin. Surtout lorsqu’on est un bon samaritain dans l’âme et que l’on a un taux de poisse proche de l’infini. Pour Sam Pickett (Mathew Baynton), modeste employé de bureau de la communauté de communes du coin, tout partait pourtant d’un bon sentiment. Il ne voulait qu’aider son prochain en ramassant le téléphone abandonné près de la voiture accidentée. Il n’avait que les meilleures intentions en répondant à la sonnerie. Pourtant bien mal lui en a pris. Lorsqu’à l’autre bout du fil une voix menaçante lui explique tranquillement qu’une femme va être exécutée s’il ne fait pas exactement ce qu’on lui dit, il comprend vite qu’il vient de mettre le pied dans un engrenage infernal qui pourrait bien bouleverser sa vie. Aidé par son seul ami, le gentil mais un peu benêt Phil (James Corden), employé du courrier de son état, Sam se retrouve bien malgré lui dans le rôle du chevalier blanc partant délivrer la veuve et l’orphelin. Complots, corruption, espionnage et kidnapping attendent les deux plus improbables héros de Grande Bretagne pour une aventure qui les marquera à jamais.

wrong car

Sam et Phil, deux héros pas tout à fait comme les autres…

La première force de cette série tient à son tandem de joyeux losers, sorte de Laurel et Hardy modernes toujours paumés et décalés mais surtout incroyablement attachants. Leur poisse et leur incapacité à réagir à peu près rationnellement aux difficultés qu’ils rencontrent pourraient être un problème, pourtant c’est justement ce qui fait leur force. Au lieu de tenter des approches modérées, Sam et Phil se jettent à corps perdus au cœur de l’action tels un Bruce Willis période Die hard ou un Jack Bauer à la petite semaine. Pour eux la meilleure solution est évidemment toujours la plus extrême et la plus folle. Bien sûr, l’enchaînement astronomique de catastrophes n’est jamais loin derrière mais il en ressort une sorte de panache chevaleresque assez admirable qui finit par nous rendre ces deux maudits idiots bigrement sympathiques.

La série va jusqu’au bout de la logique du loser magnifique. Si Sam et Phil s’embarquent dans une quête qui les dépasse totalement ce n’est pas que par idéal de justice mais aussi pour se prouver qu’ils ont en eux plus que ce que les apparences pourraient laisser croire. Employés un peu ratés, sans véritable ambition ni qualités, ils auraient toutes les raisons de laisser tomber si ce n’est qu’ils ont pour eux cette incroyable inconscience qui les pousse à se rendre utiles envers et contre tout. On pourrait croire qu’ils sont l’ultime incarnation de l’antihéros alors qu’au fond ils sont juste de téméraires chevaliers qui s’ignorent. Les héros ont bien changé. Tant mieux, surtout lorsqu’ils sont aussi drôles.

Sam (Mathew Baynton), Phil (James Corden)

Sam et Phil dans une situation normale, au bout de leur vie.

Mélanger suspense et rire, il faut oser. A part Very Bad Trip et quelques autres films jouant sur les mêmes ficelles, peu d’œuvres ont osé le pari de nous faire rire et frissonner en même temps. Wrong Mans ose le mix et réussit l’essai avec pas mal de brio. La clé du suspense ici est enchaînement de situations toutes plus inextricables les unes que les autres. Comme le veut l’expression, « quand y en a plus y en a encore ». On croit être arrivé au bout des problèmes… et non, il y a une sous-couche de complications à l’intérieur. Tout ça est peut-être improbable mais peu importe, on se laisse emporter à travers toutes les situations avec cette attente assez ludique de se dire : qu’est-ce qui peut bien leur arriver cette fois-ci ? On n’a pas forcément envie de connaitre le fin mot de l’histoire, de savoir qui a comploté quoi, l’intérêt n’est pas là. La seule chose qui compte au fond, c’est de savoir comment notre tandem de joyeux losers va réussir à triompher.

wrong temeraire

Si, si, je vous assure ils sont très courageux.

Le décalage de Sam et Phil sert d’ailleurs complètement le suspense. Leurs attitudes absurdes les mettent toujours plus en danger. Un exemple qui vaut ce qu’il vaut mais qui symbolise bien l’esprit de la série : une scène mémorable nous plonge au cœur d’une soirée organisée par un chef de mafia russe. Pris pour un escort boy, Sam se voit contraint de pratiquer un striptease sensuel devant un gangster totalement fou sous peine d’être démasqué. La situation est totalement absurde mais on se retrouve accroché au bord de son siège tandis que le mafieux multiplie les avances que Sam ne peut évidemment pas refuser. Le suspense naît d’une absurdité totale. On rit et on s’affole pour des événements complètement déjantés. Cette série ne se prend jamais au sérieux mais elle n’est pas une simple parodie, en reprenant les codes du thriller sans s’en moquer et en injectant une bonne dose de suspense dans des situations drôles le propos va plus loin. Wrong Mans devient une expérience sur les ficelles du thriller. On apprend ainsi qu’une tension peut naître de n’importe quoi et que l’alliance entre rire et suspense peut être une alchimie réussie. Pour le spectateur la recette fonctionne et le plaisir est double, on en redemanderait presque.

La preuve par deux que l’on peut être à la fois pathétiques et attachants.

On peut reprocher à The Wrong Mans son manque de vraisemblance et son côté « loi de l’emmerdement maximum » mais son ton, son esprit décalés si british en font un spectacle haut en couleur que l’on suit comme un film, une sorte de serial qui ne dirait pas son nom mais que l’on ne peut que déguster au cours d’un binge-watching gourmant. Bien écrit, avec un vrai souci du rythme, Wrong Mans est une preuve qu’encore une fois les anglais savent allier gangster et rire avec subtilité. On n’est pas tout à fait dans Arnaques Crimes et Botanique ou Snatch mais si l’ambiance est différente, l’efficacité reste de mise, bref, une vraie réussite à découvrir au plus vite.

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