Etude de pilote : Big Little Lies

Nous n’avons pas fini d’en entendre parler : Big Little Lies, la mini-série événement produite par HBO vient de débarquer sur les ondes. Très attendue par les sériephiles mais peu dévoilée par sa chaîne, nous découvrons son pilote sans trop savoir à quoi s’attendre. Big Little Lies relève-t-elle du coup de génie ou sera-t-elle une source de déception ? Et surtout, que découvrira-t-on derrière ce trio mystérieux ?…

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Un casting somptueux venu du cinéma

Ce qui est sûr, c’est que Big Little Lies n’a pas lésiné sur la composition de son casting. Tout d’abord, Nicole Kidman y retrouve le petit écran après 20 ans d’absence. Héroïne de Moulin Rouge! de Baz Luhrmann, et admirée dans Eyes Wide Shut de Stanley Kubrick, Dogville de Lars Von Trier ou encore le dramatique The Hours de Stephen Daldryon peut dire que cette actrice a toujours choisi avec goût les films dans lesquels elle a joué. Reese Witherspoon, également de la partie, a quant à elle été remarquée dans La Revanche d’une blondeDe l’eau pour les Éléphants de Francis Lawrence, Mud de Jeff Nichols ou plus récemment dans Wild de Jean-Marc Vallée. Sa filmographie ondulant entre films d’auteurs et films bien plus mainstream, Reese est toujours là où on ne l’attend pas, comme c’est le cas aujourd’hui.

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Enfin, la cadette de ce trio n’est autre que Shailene Woodley. Découverte en ado endeuillée face à un papa Clooney démuni (The Descendants), elle s’est imposée à Hollywood grâce aux films teenage à succès Nos étoiles contraires et la trilogie Divergente. Shailene avait déjà expérimenté la télévision en jouant dans de nombreuses séries, telles que La Vie secrète d’une ado ordinaire, là encore un teenage drama dont elle avait le rôle principal. Un changement de cap drastique loin des trilogies pour ados.

Du côté des personnages secondaires, on ne lâche rien non plus ! Entre Adam Scott de Parks and Recreation et Alexander Skarsgard – le vampire beau gosse de True Blood – on ne sait plus où donner de la tête. Laura Dern, muse de David Lynch dans Blue VelvetSailor et Lula et INLAND EMPIRE, mais aussi au cœur du cauchemardesque Jurassic Park, prend également part aux battles de mamans à la sortie de l’école. Enfin Zoë Kravitz, vue aux côtés de Shailene dans Divergente, mais aussi dans le dernier X-Men et le dernier Mad Max, abandonne donc le temps de 7 épisodes les apparitions dans les blockbusters.

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Cerise sur le gâteau : le réalisateur de Big Little Lies n’est autre que le québécois Jean-Marc Vallée, à qui l’ont doit l’inoubliable C.R.A.Z.Y., ou encore le magistral Dallas Buyers Club. Virage inattendu du cinéma à la série, on ne peut que se réjouir de sa décision, tant ses œuvres nous ont marqué par leur sensibilité et leur beauté. Que demander de plus ?

Le casting très ciné de Big Little Lies surprend. Assiste-t-on à un phénomène de mode où, pour ressortir du lot face à une profusion de séries toujours plus importante, on jouerait la carte des stars de cinéma ? Ou ces dernières seraient-elles tout simplement de plus en plus attirées par l’univers sériel, et son succès ?

Une photographie époustouflante

Regarder une série « moche » semble vraiment relever de l’impossible de nos jours. Big Little Lies ne déroge pas à la règle en offrant une photographie des plus soignées, permettant de mettre encore plus en lumière la perfection (apparente) de Monterey et de ses habitants.

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Une lumière éblouissante, des couchers de soleil à n’en plus finir, des décors naturels magnifiés : la représentation de cette petite ville de Californie est clairement idyllique, voire paradisiaque. Évoluant dans des milieux particulièrement aisés (énormes maisons de rêve au bord de la plage, sirotage de Chardonnay depuis leurs terrasses donnant sur un ciel multicolore, omniprésence de la mer qui appelle à la baignade), il serait difficile de ne pas en avoir l’eau à la bouche.

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La photographie a donc ici un rôle supplémentaire à une esthétisation générale de l’oeuvre. En effet, elle sert la narration à part entière en sublimant ces personnages dont la vie semble plus qu’enviable au premier abord. Des maris beaux-gosses et fortunés, une garde robe irréprochable, une beauté indélébile… La photographie capture l’essence de perfection que ces habitants tendent à offrir et donnent à voir au reste du voisinage. Mais, comme nous le savons si bien, chaque chose a une fin : la porcelaine va se fissurer, les masques vont tomber. Et on a hâte.

Un synopsis classique mais efficace

Le pitch de la série, aussi simple et déjà-vu puisse-t-il paraître, sonne en effet comme une lente et douce descente aux enfers pour les habitants de Monterey. Le jour de la rentrée des classes, Jane, une jeune mère célibataire qui vient tout juste de s’installer en ville avec son fils, fait la connaissance de Celeste et Madeline, deux autres mamans d’élèves. En apparence, elles semblent toutes deux mener des vies tout à fait normales. Mais suite à une réunion de parents qui tourne mal, ces trois femmes vont se retrouver mêlées à un meurtre…

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Même si cette trame semble au premier abord classique et peu surprenante, il est pourtant intéressant de voir comment l’arrivée d’une seule personne peut faire vaciller aussi violemment leur petit monde parfait. Élément déclencheur de la tombée des masques, effet domino abattant un à un les murs de cette communauté, Jane semblera être une coupable idéale. À peine arrivée au sein de ce microcosme sclérosé, son fils est déjà pointé du doigt comme bouc émissaire de l’école, accusé d’avoir étranglé une de ses camarades. Au-delà d’être une fable sur les apparences souvent trompeuses, il semblerait que Big Little Lies soit aussi une satire sociale.

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Jane, la mère célibataire sans artifices, ne rentre clairement pas dans le cadre aisé des autres parents d’élèves. On la prend d’ailleurs directement pour une jeune fille au pair face à son jeune âge et ses habits très simples. Ne roulant pas sur l’or et ne pouvant compter sur un mari richissime, Jane est dans l’obligation de travailler pour gagner sa vie, existence bien éloignée de celles de toutes ces femmes au foyer oisives ou totalement carriéristes et pleines aux as. Ainsi, on assiste à l’arrivée d’une figure marginale dans une communauté aux codes poussiéreux où réputation, apparences et luttes de pouvoir silencieuses sont un sport dont on ne peut être dispensé. Heureusement, Madeline et Celeste sont là pour faire entrer Jane dans ce monde qui lui est étranger, et la protéger durant la traversée.

Un drame réaliste aux multiples résonances

Big Little Lies n’est pas sans nous rappeler l’univers de nombreuses œuvres, qu’elles soient sérielles ou cinématographiques.

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Difficile d’échapper à la comparaison avec Desperate Housewives de Marc Cherry. Celeste (Nicole Kidman), toujours polie et effacée, mais à la présentation parfaite, semble avoir pris le relais de l’élégante Bree Van de Kamp. Renata (Laura Dern) ouvertement critiquée pour avoir choisi de se construire une carrière plutôt que d’être mère au foyer n’est autre que l’évolution de Lynette Scavo, tiraillée entre son rôle de mère et son désir de carrière… Nous voilà à nouveau plongés dans des relations de voisinage, entre amitié et guerre de clans. Mensonges, secrets, meurtre, enquête : tout y est. Mais si la thématique est fortement similaire, l’histoire n’a ici pas du tout le même impact, puisque le registre comique a été gommé pour laisser place à une puissance dramatique bien plus exploitée et réaliste. Bye-Bye les fous-rires à s’en taper la cuisse, bienvenue aux ambiances tendues et angoissantes.

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Le personnage de Madeline, quant à lui, semble être une Betty Draper des temps modernes. En effet, la figure de la femme au foyer de Mad Men est également convoquée dans Big Little Lies. Toutes deux sont soucieuses de leur apparence et de leur réputation. Coquettes, elles s’efforcent de montrer que l’âge ne les rend pas moins attractives. Enfin, elles ressentent l’une comme  l’autre le besoin de s’occuper afin de fuir l’ennui et le vide. La mise en scène d’une pièce de théâtre pour la ville permet notamment à Madeline de donner un sens à sa vie.
Ces deux femmes sont également tourmentées par la maternité, mais chacune à sa façon. Alors que Betty ne se sent pas avoir la fibre maternelle, et souffre de réaliser à quel point elle une mauvaise mère, Madeline, elle, s’est vouée toute entière à l’éducation de ses filles, qu’elle couve avec bonheur. Ainsi, en les voyant maintenant grandir et s’émanciper, Madeline réalise qu’elles ne seront pas des bébés pour toujours, et craint que son job de maman ne soit bientôt terminé. C’est sans compter ses problèmes de jalousie avec la nouvelle belle-mère de sa fille (Zoe Kravitz)…

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Côté cinéma, nous retrouvons aussi la thématique de la femme au foyer à la vie « parfaite », mais souffrant de sa condition. The Hours de Stephen Daldry ou Les Noces Rebelles de Sam Mendes offrent par exemple le portrait dramatique de femmes au foyer se cachant derrière une représentation de l’épouse parfaite, mais dont le bonheur et l’épanouissement sont uniquement superficiels. Enviées de tous, elles échangeraient pourtant volontiers leur place. Celeste, ravissante avocate à succès devenue mère au foyer pour se consacrer à sa progéniture, mariée à un riche homme d’affaires (bien plus jeune qu’elle d’ailleurs) ne semblerait pas pouvoir être plus heureuse pour ses voisins. Pourtant, lorsque ce pilote nous entraîne dans l’intimité de sa maison, on devine très vite qu’elle est victime de violence par son mari.

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Et l’homme créa la femme, réalisé par Frank Oz et où Nicole Kidman a joué, abordé également la question de la condition de la femme au foyer. Cette fois-ci développée dans un registre fantastique et humoristique, nous retrouvons néanmoins de véritables similitudes avec Big Little Lies. En effet, ces oeuvres présentent respectivement une jeune femme fragile, encore traumatisée par un événement du passé (dans Big Little Lies, Jane semble encore hantée par une agression sexuelle, tandis que dans le film Joanna la carriériste a été licenciée sans ménagement). Arrivant toutes deux dans une nouvelle ville dont la vie de quartier est très importante, elles n’arrivent pas à trouver leur place dans un monde dont elles ne comprennent pas les codes. Ces communautés d’une perfection presque agaçante vont pourtant être ébranlées par leur présence et leur différence.

Le rôle central des rumeurs du voisinage

Le microcosme embourgeoisé de la ville va, encore une fois dans l’histoire des séries, jouer un véritable rôle dans l’avancée de l’enquête entourant le meurtre du bal de l’école. Suite à l’incident, les investigations vont très vite se lancer, faisant imploser de l’intérieur toute cette perfection apparente pour révéler les conflits, trahisons et autres rumeurs longtemps gardées sous silence. Les choses ne tarderont sûrement pas à s’envenimer entre les habitants de Monterey, tantôt suspicieux, tantôt jaloux : ils n’hésiteront pas à livrer le moindre détail croustillant, avéré ou non, auprès des enquêteurs. Un jeu dangereux où il faudra démêler le vrai du faux.

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Le pilote de Big Little Lies a donc su nous convaincre qu’il était impératif de suivre cette série de près. Un casting plus que convaincant, une esthétique soignée, un traitement dramatique et réaliste : il ne manquait plus que Jean Marc Vallée comme réalisateur pour achever la composition idéale de cette oeuvre. Les prochains épisodes risquent d’épaissir plus encore la complexité des personnages de Monterey et d’intensifier notre attachement à Jane, Madeline et Celeste, trio de choc qui s’apprêtent à hanter longtemps nos esprits.

3 réponses à “Etude de pilote : Big Little Lies

  1. Commencé la série hier (pour l’instant que le pilote) mais totalement d’accord avec l’analyse et les références citées… En tant que fan de photo, j’ai été particulièrement sensible à la qualité de l’image et des cadrages !!! Juste j’ajouterais un film aux références de Reese Witherspoon, c’est « Walk the Line », parce que pour moi, elle est à tout jamais la June de Johnny…

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