Les nombreuses projections d’épisodes et de bandes-annonces du festival nous ont permis d’avoir un aperçu de dizaines de séries européennes, en cours de production ou de diffusion dans leurs pays d’origine. Lesquelles a-t-on le plus envie de retrouver sur nos écrans ?
Hassel (Suède – Viaplay)
Synopsis : Roland Hassel, ancien voyou devenu flic, lutte contre la petite délinquance et la drogue dans les banlieues de Stockholm. Détective bourru mais efficace, il combat le crime à sa manière, très loin des manuels de police mais ancré jusqu’au cou dans une réalité difficile et violente. Tout bascule pour lui lorsque son supérieur et mentor Yngve Ruda est assassiné. Dès lors, plus rien n’a de sens pour lui sinon la vengeance, à n’importe quel prix
Notre avis : Le flic brisé par la vie, le contexte peu reluisant, à première tout pourrait nous laisser croire que nous voici devant le dernier rejeton du genre prolifique du Nordic Noir. Pourtant, si certains codes sont bien présents, ce polar-ci sait tirer son épingle du jeu par ses partis-pris plutôt originaux. L’esthétique de la série fondée sur les paysages nocturnes de banlieues industrielles, le héros musculeux et la bande son des plus funky, tout concourt à nous plonger dans un univers très 70’s évoquant beaucoup plus les polars de la blaxploitation que la froideur scandinave. Tant mieux : ce petit revival promet beaucoup. Si les amateurs de pittoresque suédois passeront leur chemin, les fans de héros abîmés mais charismatiques pourraient bien être conquis.
Home Ground (Norvège – NRK)
Synopsis : Helena Mikkelsen aurait dû toucher du doigt le sommet de sa carrière professionnelle. Reconnue et respectée en tant que coach dans le football féminin, sa carrière semblait toute tracée sans pourvoir connaitre la moindre remise en doute. C’était compter sans une étrange proposition qui allait pour elle tout remettre en question. Une proposition pas comme les autres, celle de devenir la première femme à entraîner une équipe masculine en première division norvégienne et de relever le challenge d’écrire l’histoire de son sport. Confrontée à la difficulté de devoir remettre sur la voie du succès un club en grande difficulté, Helena va devoir aussi se battre contre un milieu qui ne l’accepte pas. Joueurs rebelles, fans haineux ou journalistes guettant sa chute, tous semblent rêver de la voir abandonner ou pire : connaitre l’échec. Sa détermination et son talent lui permettront-ils de triompher ?
Notre avis : Que l’on soit amateur de foot ou non, Home Ground repose sur une promesse très forte qui ne peut que donner envie d’aller plus loin, celle de voir un portrait de femme à mille lieues de ce que l’on a pu voir et revoir cent fois sur nos écrans. Ici, nous ne sommes pas devant une héroïne sexy, l’incarnation d’une génération ou une figure de mère mais tout simplement devant une femme passionnée qui se bat pour ce en quoi elle croit envers et contre tout. Une figure qui rappelle d’ailleurs par certains aspects celle de Mickey Rourke dans le The Wrestler de Darren Aronofsky. A travers le football ce sont les questions du sacrifice et des discriminations de tous ordres qui semblent ici évoquées. Qu’est-on prêt à perdre pour aller au bout de ses convictions ? Comment combattre les préjugés lorsque l’esprit de groupe galvanise les haines et les rejets ? Autant de problématiques très présentes dans notre société qui semble ici traitées avec subtilité et sensibilité.
La série est actuellement en tournage et seules quelques images ont été diffusées au festival Série Séries. Un court aperçu, donc, mais qui donne pourtant l’envie d’en voir beaucoup plus. A découvrir bientôt pour confirmer ces quelques impressions.
The Swell (Belgique/Pays-Bas – Eén/NPO1)
Synopsis : Une tempête sans précédents s’abat sur l’Europe, et les digues qui protègent la côte des Pays-Bas et de la Belgique sont menacées. Pour ces pays dont le territoire est en partie situé sous le niveau de la mer, l’heure est potentiellement grave. Mais les autorités néerlandaises refusent de suivre l’exemple de leurs homologues belges, et renoncent à une évacuation anticipée d’une partie de la population, qui continue ainsi sa vie tranquillement sous ce mauvais temps. Mais quand les digues finissent par céder, une gigantesque vague déferle sur le pays, et nombreux sont ceux qui se retrouvent piégés par les eaux.
Notre avis : On avait raté la mini-série lors de Séries Mania cette année, et Série Series a été l’occasion de rattraper cette erreur et découvrir celle qui a été un phénomène d’audiences dans ses pays d’origine en novembre dernier. Et on le comprend : le raz-de-marée, très convaincant grâce à des effets spéciaux malins, met tout un épisode à arriver, mais rythme soutenu et cliffhangers rendent la série immédiatement très prenante. Les créateurs ne voulaient pas seulement d’un scénario catastrophe, et se concentrent avant tout sur le vécu des personnages que l’on va suivre lors de cette épreuve. Ceux-ci, et leurs diverses problématiques, nous sont présentés avec fluidité : un premier ministre dépassé, une famille bourgeoise au bord de l’implosion, un vieux musicien fraîchement veuf… On n’échappe pas à une certaine prévisibilité, mais ces archétypes nous réservent des surprises, sont tenus avec efficacité, et passent de toutes les manières au second plan derrière le message politique, social et écologique de la série. Si tant de spectateurs hollandais et belges sont restés rivés à leurs écrans, c’est en effet aussi parce que le risque d’inondation est plus réel que jamais avec la montée du niveau des océans ; il y a quelque chose de glaçant dans la manière dont la série dépeint l’insouciance de tous face au désastre annoncé (hmhm), et la priorité donnée aux enjeux économiques par rapport aux enjeux humains (HMHM).
Der gleiche Himmel (The Same Sky, Allemagne – ZDF)
Synopsis : Les agents de la Stasi se suivent mais ne se ressemblent pas : certains sont des Roméos, de jeunes hommes formés à la séduction massive et irrésistible puis envoyés en RFA pour soutirer des informations aux secrétaires esseulées. (Et attention, ils ont vraiment existé). En 1974, Lars, l’un d’entre eux, communiste convaincu et féroce patriote comme son père, est sélectionné pour une mission à Berlin-Ouest… Tandis qu’un collègue de son oncle prof, homosexuel, et sa petite cousine, championne de natation, rêvent justement d’un ailleurs un peu moins autoritaire.
Notre avis : Après Deutschland 83, on continue d’explorer une Allemagne scindée en deux, partagée entre Ouest et Est, capitalisme et communisme, au travers d’un récit d’espionnage et d’allégeances troubles. Comme sa très réussie prédécesseure, Der gleiche Himmel allie parfaitement enjeux légers et sérieux, humour et suspense, sur une bande-son aux petits oignons. Si le héros est peut-être un peu moins sympathique, le travail de reconstitution semble encore plus impressionnant, sachant qu’on troque seulement de décennie : pattes d’eph’, fauteuils œufs et David Bowie pour l’Ouest, intérieurs plus modestes et chaînes de télévision d’État en RDA, chaque détail est parfaitement soigné et conforme aux moindres souvenirs des Allemands qui ont vécu à cette période – à l’instar du réalisateur Olivier Hirschbiegel, connu pour La Chute, dont on sent d’ailleurs le savoir-faire au niveau de la mise en scène. Niveau scénario, difficile de ne pas faire de parallèle avec sa presque rivale… Mais là où on perd une part du facteur surprise, on gagne en diversité des thèmes, les intrigues secondaires permettant d’évoquer les sujets plus rares du dopage ou de l’homosexualité sous le régime communiste. Le pilote laisse entrevoir un énorme potentiel, que l’on a hâte de vérifier dans les cinq autres épisodes de cette mini-série déjà courtisée par Netflix.
Our Time is Now (Suède – SVT Drama)
Synopsis : Le restaurant de la famille Löwander est l’un des plus prestigieux de la ville de Stockholm, et est parvenu à satisfaire les besoins de ses clients pendant toute la seconde Guerre Mondiale. Cependant, ceux-ci étaient de moins en moins nombreux, et de plus en plus nazis. Quand la guerre s’achève, le fils aîné et gérant Gustaf doit ainsi gérer la menace de banqueroute, le retour de son cadet militaire, et ses propres allégeances troubles, tandis que sa plus jeune sœur s’entiche d’un commis de la cuisine…
Notre avis : Des fresques familiales historiques, il y en a plein. Des séries gastronomiques aussi. Le fait de combiner les deux ravive l’intérêt que l’on peut porter à cette série, qui bénéficie de plus d’une fraîcheur et d’un dynamisme finalement assez rares dans les séries scandinaves – les créateurs s’étant volontairement éloignés du genre du Scandi Noir en insufflant humour et impertinence à leur ton enlevé. Le restaurant permet de plus d’aborder l’après-guerre sous l’angle peut-être un peu moins vu des rationnements et du marché noir, d’autant que cela invoque avec subtilité la question de la collaboration, des inégalités sociales et de ceux à qui profite la guerre. Si on ajoute à cela un casting très charismatique, la série peut tout à fait devenir la nouvelle obsession des fanas de period dramas. Deux saisons sont d’ores et déjà prévues.
Ah oui, moi j’ai bêtement attendu American gods, car Neil Gaiman est mon dieu, mais il y a donc d’autres séries! Un grand merci pour ces découvertes, le nordic noir, ce n’est pas trop mon truc, mais le truc teuton, why not?
American Gods c’est très très bien aussi, d’ailleurs (teasing) on a un article en préparation sur le sujet :)