Showrunner : Vince Gilligan

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Crédit photo : Ramona Rosales pour The Hollywood Reporter

Sa bio

Vince Gilligan, né en 1967, a grandi en Virginie dans la petite bourgade (6000 habitants) au nom charmant de Farmville, près du site où les Sudistes concédèrent la défaite qui mit fin à la Guerre de Sécession. Grâce à une bourse, en 1985 il quitte le domicile familial (un père dans les assurances, une mère enseignante) pour aller étudier le cinéma à la New York University. Il remporte en 1989 un concours pour son scénario de Home Fries, qui deviendra presque 10 ans plus tard un film avec Drew Barrymore et Luke Wilson. Gilligan décide alors d’aller tenter sa chance à Hollywood, où il vend un second script, Wilder Napalm, qui sera également produit. Mais il ne parvient pas à transformer l’essai et, en 1994, il aurait peut-être été réduit à se nourrir uniquement de fast-food à la Los Pollos Hermanos si son agent n’était pas parvenu à lui décrocher un entretien avec Chris Carter, le créateur de X-Files. Il s’installe pour de bon en Californie pour son premier travail à temps plein dans le monde de la TV : pendant sept ans, il est auteur et producteur exécutif sur la série phénomène (Golden Globe dans la catégorie drame en 1995, 1996 et 1998), jusqu’à ce que X-Files soit annulé au début des années 2000. Commence alors sa deuxième « traversée du désert », une succession de faux départs et déceptions qui dure cinq ans. Heureusement, cette fois-ci il a de quoi se nourrir correctement : « L’argent était moins un problème, mais en tant que scénariste, je voulais pouvoir travailler sur quelque chose qui avait au moins une toute petite chance d’être produit. »

En 2005, lors d’un échange au téléphone avec son vieil ami et ancien collaborateur sur X-Files, l’auteur Thomas Schnauz, Vince Gilligan se désole de ne plus trouver aucun débouché à Hollywood :

Peut-être qu’on pourrait devenir caissiers à Walmart ? Peut-être qu’on pourrait acheter un camping-car et le transformer en labo de crystal meth ?

La suite vous la connaissez, ou presque.

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Sur le tournage de Breaking Bad. Crédit photo : Gregory Peters

Avec une idée pareille, et un background en cinéma et TV, la première question que Gilligan se pose c’est s’il vaut mieux en faire un film ou une série. HBO ayant ouvert la voie pour des projets ambitieux sur les chaînes du câble américain, le futur showrunner* de Breaking Bad décide d’aller frapper à leur porte. Mais ils passent leur tour. Idem pour Showtime (qui avait déjà produit une série au pitch assez similaire, mais dont Gilligan n’avait jamais entendu parler : Weeds), TNT, et FX. Stoïque, le scénariste était prêt à se remettre au travail, sans grand enthousiasme, sur le script du film Hancock. C’est à ce moment-là qu’intervient AMC, petite chaîne montante du câble qui surfait en 2007 sur le début de la vague Mad Men. Ils étaient à la recherche d’un second projet « prestige », avec une histoire originale et sans costumes d’époque (le slip vintage aperçu dans le pilote de Breaking Bad, ça compte ?). AMC ne recule devant rien : ni un personnage qui reçoit un diagnostic de cancer dès les 20 premières minutes, ni un synopsis basé sur la fabrication d’une des drogues les plus destructrices et les moins glamours qui existent, ni un héros qui devient rapidement un antihéros, ni ce fameux slip, donc. « Breaking Bad« , une expression qui vient du Sud des Etats-Unis et qui signifie « se lâcher », était né.

Son style

Non seulement la série de Vince Gilligan a été comparée à Weeds, mais aussi aux Soprano (un homme poussé à user de moyens peu orthodoxes pour subvenir aux besoins de sa famille), à Tarantino (pour la violence délirante), voire même au western spaghetti ! Pourtant, son univers est unique. Pour faire des économies, Breaking Bad est tourné au Nouveau Mexique, à Albuquerque (je vous mets au défi de répéter ce mot 10 fois très vite sans vous tromper) sous un soleil brûlant (sur le tournage, Gilligan avale des litres de thé glacé, son « brain juice »). Cet environnement aride et hostile fait partie de l’ADN de la série, au même titre que ses héros représentatifs de la classe moyenne américaine : un prof de chimie un peu loser, un agent des forces de l’ordre dont la femme n’arrête pas de lui répéter qu’il mérite une promotion, la mère d’un enfant handicapé qui s’inquiète parce que son assurance maladie risque de ne pas couvrir tous les frais liés à sa seconde grossesse, un jeune paumé accro aux jeux vidéos et à la meth qui parle comme les gangsters, mais pas vraiment…

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Bien sûr Breaking Bad c’est un travail d’équipe, mais c’est surtout le génie visionnaire de Gilligan, qui avait écrit tout l’arc de la saison 1 avant même de tourner le pilote, et la performance incroyable de Bryan Cranston, récompensé trois années d’affilée aux Emmy Awards. Comme Matt Weiner, David Chase et David Simon, Gilligan est un showrunner qui fait corps avec ses personnages. L’ambiguïté morale de Walter White, sa descente vers le mal à l’état pur, c’est un homme charmant et sociable qui les a imaginées de bout en bout, parce que « cela m’amuse d’explorer la noirceur de ce père de famille criminel, dans la vie je suis bien trop timide pour me comporter comme Walter White ».  Maintenant que la série est terminée, Gilligan ne cache pas un certain soulagement : « je suis content de ne plus passer tout mon temps avec Walt » (pas nous !). Alors puisque qu’il a la tête libre pour de nouveaux projets, on a hâte de voir ce qu’il va nous sortir de son chapeau. Vite, qu’on lui serve un verre de « brain juice » !

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Ses séries

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AMC fête le dernier épisode de sa série culte. Crédit photo : Mark Davis pour Getty

Sources et lectures complémentaires

The Dark Art of Breaking Bad, de David Segal (The New York Times Magazine)
Breaking Bad’s Big Break: How Vince Gilligan conceived Breaking Bad, and sold it to AMC, de Brett Martin (Moving Image Source)
In Conversation: Vince Gilligan on the End of Breaking Bad, de Lane Brown (New York Magazine)
Breaking Bad’s Vince Gilligan Reveals Details of Saul Spinoff and Terror Over What’s Next, de Lacey Rose (The Hollywood Reporter)
Our Man in Hollywood, de Jim McConnell (The Chesterfield Monthly)

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