Semaine d’un sériephile (74) : pilotes de la rentrée

Cette année encore, la télévision américaine nous a offert une flopée de nouvelles séries. Malheureusement, parmi celles que nous avons vues, il n’y a pas d’alerte à l’addiction mais plutôt beaucoup de déceptions.

Comédies
Scream Queens : le mélange raté entre Glee et American Horror Story (Fox)

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Scream Queens, la nouvelle série de Ryan Murphy, un des showrunners* les plus prolifiques d’Hollywood, auteur de Glee et American Horror Story, a mis le paquet cet été pour sa campagne marketing. Emma Roberts dans le rôle principal, Jamie Lee Curtis – une des plus fameuses scream queens du cinéma, Diego Boneta, Lea Michele de retour… les attentes pour cette série étaient aussi élevées que le fut ma déception.

Comme dans Glee, les personnages sont des outsiders ignorés et maltraités par les plus populaires parce qu’ils appartiennent à la mauvaise classe sociale. En plantant son décor sur un campus, et plus particulièrement la sororité Kappa Kappa Tau, dont les membres vont être les victimes d’un tueur en série aux allures de diable rouge, Ryan Murphy dénonce une société américaine sectaire. Malheureusement pour lui, son propos se perd complètement dans une mise en scène outrancière.

Scream Queens agace dès les premiers instants. Tout, absolument sonne faux tout dans la série, tant les exagérations sont navrantes. Les personnages sont stéréotypés à l’extrême, à l’image  de ce groupe de pestes insupportables, qui s’accordent tous les droits parce qu’elles sont belles et riches. Les couleurs sont criardes, les mouvements de caméra trop nombreux. La série se veut être une parodie de slasher et la critique d’une jeunesse obsédée par l’image qu’elle renvoie sur les réseaux sociaux, mise en lumière par le personnage d’Ariana Grande, qui à l’aube de sa mort préfère poster un statut facebook que prendre ses jambes à son cou. Mais le résultat pèche en ce sens qu’au lieu de rire, on lève les yeux au ciel tant elle est caricaturale et on a hâte que ça s’arrête.

Dr.Ken : Ken Jeong en fait trop (ABC)

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Ken Jeong nous avait fait nous tordre de rire dans Communityalors quand on a su qu’il allait avoir sa propre sitcom il y avait peu de chances d’être déçus… Légèrement inspirée de la vie de son interprète principal, Dr. Ken nous emmène dans le quotidien de Ken Park, qui doit jongler entre ses patients et sa vie de famille. D’un côté c’est un médecin moqueur et désagréable, de l’autre c’est un père sur-protecteur.

Ken Jeong gère à lui seul tout le potentiel comique de la série : parfois sarcastique, parfois bête, parfois immature, entre grimaces et gesticulations, il ne s’arrête jamais,  au détriment des autres personnages (dont l’adorable Albert Tsai vu dans Trophy Wife) qui ne lui servent finalement que de faire-valoir.

On aurait bien voulu accrocher à Dr. Ken mais comme on l’a vu récemment pour Grandfatheredun acteur populaire ne suffit pas à porter une série, surtout quand cette dernière manque cruellement d’enjeux.

Life in Pieces : une famille pas si moderne (CBS)

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Créée par Justin Adler, ancien producteur et scénariste de séries comme Less Than Perfect, Samantha Qui ? et Better off Ted, Life in Pieces est une énième série familiale au scénario banal, celui d’une grande famille composée d’une multitude de personnages stéréotypés. Dans la jungle des comédies familiales, ce genre très populaire, il est difficile de sortir du lot. Et pourtant, la récente sitcom Your Family or Minequi ne restera pas dans les annales du genre, a eu le mérite de proposer un angle nouveau, celui d’un couple coincé entre leurs belles-familles respectives.

James Brolin et Dianne Wiest tirent le casting vers le haut mais la série manque cruellement de personnages attachants ou cultes comme c’est le cas de Phil dans Modern Family ou de Sheldon dans The Big Bang Theory.  Elle fait seulement sourire là où d’autres séries nous font clairement mourir de rire. On peut lui laisser une dernière chance mais une série multi caméras aurait été préférable pour compléter l’offre de CBS. Life in Pieces aurait parfaitement sa place avec les séries du mercredi d’ABC dont la programmation repose uniquement sur des séries familiales en single-camera. Sans le lead-in de The Big Bang TheoryLife in Pieces ne tiendra pas une saison.

Red Oaks : Amazon et Steven Soderbergh aiment les années 80 (Amazon)

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Été 1985. David est moniteur de tennis dans un country club du New Jersey. Si pour ses clients, l’insouciance est de mise, David, lui,  est à un tournant de sa vie car à la rentrée, il quitte le lycée pour l’université.  Ces vacances sont l’occasion pour David de se poser tout un tas de questions sur son futur personnel et professionnel. Pour l’aider il pourra compter sur ses collègues, davantage que sur ses parents (Richard Kind et Jennifer Grey), un peu trop étouffants et délurés. On se laisse assez facilement séduire par cette comédie qui nous offre une palette de seconds rôles attachants et dont on a hâte de découvrir les trajectoires.

Espionnage et procedural*
Quantico : la fille adoptive de Shonda Rhimes (ABC)

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Quantico fait indéniablement penser aux séries de Shonda Rhimes. Diffusée sur ABC, cette dernière arrivée regroupe les ingrédients qui ont fait le succès de Grey’s Anatomy et How To Get Away With Murder.

On y suit un groupe de jeune recrues du FBI, de tous horizons, venues suivre leur formation dans le but de devenir un jour des « special agents« .  Rien de très original dans la structure narrative de ce pilote, qui se révèle efficace. Il s’agit ici de présenter un à un les personnages aux étiquettes évidentes comme le gay, le mormon, la fille riche du Sud, le fils de, la jeune femme à forte tête, la musulmane… Ensuite, à nous, spectateurs, de scruter les moindres recoins de leur personnalité afin d’essayer de comprendre qui est coupable.

En effet, Quantico reprend le procédé narratif de HTGAWM : le flashback. Neuf mois après leur arrivée à Quantico, un attentat terroriste, le plus gros depuis le 11 septembre, détruit la Gare Centrale de New York. Alex Parrish (Priyanka Chopra), une des recrues, est retrouvée seule et vivante au milieu des décombres faisant d’elle le principal suspect. Accusée à tort et fugitive, elle va devoir mener l’enquête pour découvrir lequel de ses collègues est responsable.

Nous assistons donc en temps réel à sa course contre la montre pour prouver son innocence, tandis que dans les séquences pré-attentat on sera amené à découvrir les secrets des recrues, révélant des personnalités beaucoup plus complexes qu’il n’y paraît. Il y aura par ailleurs de l’amour, des trahisons et des rebondissements dignes des soaps qui font le succès de la chaîne.

Limitless (CBS) et Minority Report (Fox) : changer de format, changer de recette ?

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Mystères de la programmation, CBS et Fox ont toutes deux décidé d’adapter un film d’anticipation à succès des années 2000, soit Minority Report de Steven Spielberg (2002), dans lequel on peut arrêter les crimes avant qu’ils surviennent, et Limitless de Neil Burger (2011), dans lequel une substance addictive multipliait les capacités humaines. Et ce n’était pas une mauvaise idée : les deux films, Minority Report avant tout, ont un concept unique qu’il est intéressant de creuser, avec potentiellement beaucoup de suspense et peut-être même un peu de réflexion à la clé. De plus, la science-fiction est assez délaissée à la télévision américaine depuis quelques temps, et les deux chaînes avaient donc l’opportunité d’offrir des shows différents du reste de leur programmation.

Las ! Dès le pilote, on voit que le principe même d’innovation a été non seulement laissé de côté, mais salement piétiné : en effet, pourquoi s’embêter à creuser la narration quand on peut faire rentrer n’importe quelle idée originale dans le moule du procedural ? Donc voilà, on hérite d’un héros doté d’une caractéristique qui sort de l’ordinaire – enfin, pas sa catégorie socio-culturelle, hein, il reste jeune et blanc – auquel on adjoint une femme d’action qui travaille dans la police, qu’il finira peut-être par pécho. Je ne suis pas precog, mais je devine dans les autres épisodes une suite d’enquêtes avec le maigre twist du surnaturel. Limitless sort cependant gagnante du duo : Bradley Cooper vient dire coucou, ça fait toujours plaisir de revoir Jennifer Carpenter après Dexter, même dans un rôle bien trop similaire, et parce que Jake McDorman a à peu près quatre mille fois plus de charisme que Stark Sands. Pas étonnant que Minority Report soit déjà plus ou moins annulée : la présence de Wilmer Valderrama ne saurait compenser l’absence de Tom Cruise.

Rosewood : Life. Death. Miami. (et ennui mortel). (Fox)

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Rosewood est un médecin légiste privé qui sévit sur les côtes ensoleillées de Floride et qui va devoir collaborer avec une fliquette qui hait ses méthodes. Et voici venu, comme à chaque rentrée, l’énième procedural de base qui ne s’embarrasse pas avec l’originalité et la finesse. Un homme, une femme. Ils se détestent et vont s’aimer. Ils sont sûrs d’eux mais ont des faiblesses (indice sur l’affiche : il s’agit de la mort). Ils enquêtent sur des meurtres sordides dans un milieu luxueux et glamour. Ces quelques lignes sont suffisantes pour résumer les éventuelles 18 saisons à venir, même si gageons que vu le niveau (et le fait qu’il ne s’agisse pas d’une franchise, coucou CSI et NCIS) il y a un risque d’annulation prématurée.

Soap Opera*
Blood and Oil : une vision moderne de la ruée vers l’or, datée et insipide (ABC)

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Avant même sa diffusion, Blood and Oil a connu des débuts créatifs chaotiques : remplacement de son showrunner (Cynthia Cidre a laissé sa place à Jon Harmon Feldman) et deux changements successifs de titre (Boom puis Oil). Diffusée sur ABC fin septembre, cette série qui suit la nouvelle vie d’un jeune couple à la recherche de l’American Dream dans le Dakota du Nord est purement et simplement ennuyeuse.

Ce soap traditionnel que l’on pourrait vaguement rapprocher de Dallas (pétrole, pouvoir, argent, sexe) ne peut ni compter sur un scénario rythmé et intriguant,  ni sur des personnages captivants. Chace Crawford (Gossip Girl) et Rebecca Rittenhouse (Red Band Society) forment le couple le plus fade du moment et ils ne font clairement pas le poids face à Don Johnson (Nash Bidges), Amber Valletta (Revenge) et Scott Michael Foster (Halt and Cath Fire), très convaincants.

Aucun enthousiasme donc pour ce pilote qui enchaîne des scènes « choc » (accident de voiture, duel sous la pluie) avec quelques scènes de sexe pour faire monter la température, et deux retournements de situation finaux,  comme si les scénaristes cherchaient désespérément à nous faire rester… alors que ça vient de commencer.

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